« Oh wow ! » : le cabaret qui déjoue les stéréotypes de genre

Le collectif Cirque fier.e.s présentait son cabaret « Oh wow ! » au Consulat (Paris XIe), ce 22 décembre. Dans la conception de leurs numéros ou dans leur cadre de travail, ces artistes se démarquent de la tradition circassienne : ici, les rôles masculins et féminins ne sont pas figés.

Si les pratiques du cirque reposent, le plus souvent, sur une « une stricte division sexuelle du travail » selon Marine Cordier, sociologue, le collectif Cirque fier.e.s propose, lui, dans son spectacle cabaret Oh wow, une pratique en opposition avec les schémas hétéronormés. Lors de cette représentation unique au Consulat (Paris XIe) à quelques jours de Noël, Merry ­— qui se reconnaît en tant que femme (elle/elle) —  et Hybris — qui se reconnaît à la fois dans la non-binarité et le masculin (iel/il) — ont décidé, pour leur numéro, de ne « pas avoir le rôle de porteur unique et de voltigeur unique ». Une volonté de se démarquer de la tradition où supporter le poids d’un partenaire revient, toujours selon la sociologue, « à un costaud aux larges épaules ».

Lors d’une répétition du Cirque fier.e.s au Consulat, Paris XIe, le 19/12/2022. © Émeline Sauser

Une volonté de subvertir les assignations de genre

À la différence d’autres compagnies de cirque, où les assignations de rôles peuvent être genrées, ici, « chaque numéro est interprété par les artistes qui en ont, eux-mêmes, pensé la symbolique », précise Alexandre, chargé de production du collectif. Libre alors à Natrix de se produire dans un numéro de Drag-King, inspiré de la série Lucifer : « J’adore cette série, mais je déteste le personnage principal. Donc, je le remplace. » Ainsi est né « Le diable s’habille en cuir » où l’artiste détourne l’attitude virile de celui qui cumule les conquêtes féminines. Vêtu d’un pantalon en cuir qui laisse entrevoir des dessous en dentelle, il enchaîne figures acrobatiques et poses sur le mât pendulaire sur fond musical de Call me Devil.

« Éviter de reproduire des oppressions »

Cette liberté artistique est aussi liée à un cadre de travail où « il n’y a pas besoin de se poser de question » selon l’homme en costume de cuir et de dentelle : Natrix s’y sent à l’aise. Dans leur numéro, Alia et Iris — qui se reconnaissent toutes deux en tant que femme — évoquent les attouchements dont certains artistes de cirque ont pu être victimes dans leur carrière professionnelle. Une situation loin de celle qu’elles vivent au sein du collectif où la proximité est placée sous le signe de la bienveillance.

Iris, une des artistes du collectif, répète son numéro de tissu. © Émeline Sauser

« Évoluer dans les arts du cirque ne veut pas forcément dire que c’est un lieu où l’on se sent en sécurité », remarque Alexandre. La troupe aspire à créer un « safer place » : un espace où l’on « évite autant que possible de reproduire des systèmes d’oppression ».

Texte : Imane Lbakhar

Photos : Émeline Sauser

Le Football club Arc-en-ciel se bat pour faire avancer la cause LGBT

L’équipe mixte et LGBT+ du Football club Arc-en-ciel s’entrainait le mercredi 21 décembre 2022 pour la dernière fois cette année, au stade Maryse Hilsz du XXe arrondissement de Paris. Les footballeurs et footballeuses sont en colère contre la Fédération et contre l’équipe de France qui a refusé de porter le brassard arc-en-ciel lors de la Coupe du monde au Qatar.

Cami, 23 ans, entre sur le terrain pour son premier entrainement avec l’équipe Arc-en-ciel. Depuis longtemps, il cherchait un club où jouer sans être jugé sur son orientation sexuelle. Cami est un homme trans. Le Football club Arc-en-ciel est ouvert à tous et à toutes, quelle que soit son orientation sexuelle. Les joueurs et les joueuses s’entrainent le mercredi, le jeudi et le samedi soir au stade Maryse Hilsz, dans le XXe arrondissement de Paris. La saison 2022 a pris fin ce mercredi 21 décembre. Ce soir, le jeune homme est soutenu par son amie Coriandre, qui le met en confiance. Il se lance et dépasse ses appréhensions, marquant presque un but.

Cami, 23 ans, assiste à son premier entrainement. Le FC Paris Arc-en-ciel est une association sportive Lesbienne, Gay, Bi et Trans (LGBT) & friendly. Le club lutte contre toute forme de discriminations. Stade Maryse Hilsz, Paris XX. 21/12/2022. © Claire Corrion.

La Fédération française de football met un frein à l’inclusion

Au FC Arc-en-ciel, où l’on se bat contre l’homophobie depuis 1997, le nombre d’adhérents ne cesse d’augmenter et les places au sein d’un club sont désormais rares. Celui-ci reste convaincu qu’un football inclusif est possible, tout en constatant le manque de reconnaissance dans le milieu. Les clubs mixtes et LGBT sont rares, autant que les créneaux d’accès aux stades et les subventions de la part de la FFF. Les joueurs solutionnent le problème en s’affiliant à trois fédérations : la Fédération française de football, à laquelle peuvent adhérer des équipes féminines, la Fédération sportive et gymnique du travail qui acceptent des équipes mixtes et Sports LGBT dont l’objet est l’inclusion des personnes lesbiennes, gays, bi et trans.

 « Tout cela nous a poussé à nous organiser et à nous engager politiquement et socialement. Nous luttons hors des stades contre toutes formes de discrimination » raconte Marion, joueuse et responsable de l’équipe mixte. Âgée de 33 ans, elle joue au foot depuis ses 11 ans et a subi de nombreuses remarques sexistes : « On ne me passait pas le ballon, on me disait que je jouais comme une fille et que je n’avais pas ma place sur le terrain. » Marie-Lyse Lounes, coach du FC Arc-en-ciel explique : « l’inclusion, le respect de soi et des autres, l’entraide, la solidarité, la non-discrimination selon son niveau, son âge, sa religion, son orientation sexuelle, sont des valeurs essentielles. » Cami a tenu tout le match malgré la fatigue. Il espère se faire accepter au sein du club. Rendez-vous le 4 janvier 2023 pour la reprise des entrainements.

Texte : Christophe Vallée

Photo : Claire Corrion