Nous passons la journée du 3 juin en compagnie d’Alice et de Laure.
Laure Defiolles, éditrice indépendante, travaille notamment pour les éditions Alma. Elle partage avec nous certaines de ses expériences et sa vision de la relation éditeur-auteur : pour elle, être éditeur est un métier d’accompagnateur.
Pour sa part, Laure relit au moins quatre fois un manuscrit avant de le confier au correcteur. Nous ne recevrons jamais la version initiale d’un manuscrit ! Et il nous sera parfois difficile d’obtenir des réponses à nos éventuelles questions car un an peut s’écouler entre l’acceptation d’un projet et la parution du livre ; il peut en effet y avoir de deux à cinq versions du manuscrit et l’auteur travaille souvent sur un autre projet à ce moment-là.
Laure a énoncé quelques règles d’or dans son métier :
- avant tout, ménager l’auteur, qui a souvent passé beaucoup de temps sur son texte et a du mal à accepter les modifications proposées – en particulier les coupes ;
- veiller à ce que le livre soit le plus compréhensible possible – pour ses futurs lecteurs : attention aux lourdeurs, reprises, annonces inutiles, répétitions, digressions, ellipses, incohérences dans la caractérisation des personnages… ;
- repérer les « emprunts digérés » : un auteur ayant mené des recherches poussées sur son sujet peut reproduire de mémoire, sans s’en rendre compte, des extraits d’auteurs qu’il a mémorisés ;
- s’assurer du rythme et de l’équilibre du texte : articulation des chapitres, aération des paragraphes, multiplicité de personnages secondaires inutiles ;
- prendre garde à la vraisemblance dans un texte de fiction (anachronismes) et à la fluidité du style (multiplication d’adjectifs et d’adverbes).
L’éditeur confie ensuite le manuscrit au correcteur et lui explique ce qu’il attend de lui, pour la modeste somme de 2 à 2,50 euros pour 1 000 signes (en relecture sur épreuve) et 3 à 4 euros pour 1 000 signes (en préparation de copie).
Laure nous conseille de « faire parler le lecteur en nous » et de ne pas céder à la tentation du correcteur, qui est naturellement de gommer des erreurs telles que des incorrections grammaticales. Or si on lisse trop le texte, le livre peut perdre une partie de son intérêt…
Dernière tâche de l’éditeur : informer le correcteur quand l’auteur s’oppose aux modifications qu’il a suggérées.
Dans la continuité de la matinée, Alice nous donne à corriger le texte que Laure a pris pour exemple. Il y a si peu de fautes que nous ne pouvons qu’y placer les virgules manquantes.
Au passage, quelques révisions s’imposent : on ne fait pas l’élision de « presque » sauf pour « presqu’île », l’accord des mots qui suivent « sans » se fait en fonction du sens (exemples : un pull sans manches, un homme sans parole), etc.
Retenons une nouvelle fois que l’on doit se fier au Larousse pour les noms de pays, d’une part ; et que ces deux raccourcis bien pratiques : alt+maj+espace pour les espaces insécables, et alt+maj+tiret pour le tiret moyen d’incise, nous feront gagner du temps sur Word et InDesign.
Le métier a l’air de rentrer en tout cas…
M. S. et E. V.