Enquête métier – Journal mensuel L’âge de faire

Connaissez-vous la carte de la « presse pas pareille » ? Cette expression a été lancée par le journal Le Ravi (Marseille) pour définir des journaux libres, indépendants, alternatifs…

Pour l’enquête métier, j’ai eu la chance de rencontrer l’équipe de L’âge de faire à L’Onde de coop le 19 juin dernier à la Cité Fertile !

Fabien Plastre du service de la diffusion et de la communication m’a mis en contact avec la journaliste Lisa Giachino pour un retour d’expérience.

 

1) Lisa Giachino, quelle formation avez-vous ?

J’ai fait un DEUG d’histoire et un DUT de journalisme à Bordeaux (devenu depuis ijba). J’ai eu mon diplôme en 2002.

2) Depuis quand êtes-vous journaliste ?

Je suis journaliste à temps plein depuis 2003. L’année d’avant, j’ai effectué quelques petits boulots dans le journalisme et dans la restauration.

3) Quel statut avez-vous ?

J’ai le statut de journaliste. Pendant dix ans, j’ai été directrice de publication de L’âge de faire. Je suis également salariée-associée de la Scop L’âge de faire, dont j’ai été gérante puis cogérante pendant sept ans. Depuis février 2021 et pour une période d’un an, je suis détachée de la rédaction pour m’occuper du développement et de l’animation du lieu partagé que nous avons cofondé, la maison commune.

4) En quoi consiste la maison commune ?

La maison commune est un lieu-ressource qui veut participer à la transition écologique et solidaire d’un centre industriel en perte de vitesse, Saint-Auban, dans les Alpes-de-Haute-Provence. L’âge de faire s’investit depuis plusieurs années dans ce projet où seront installés les locaux du journal. Un projet à la croisée de l’économie, du social, de la culture et de l’écologie. Pour plus d’infos, cliquez ici.

5) Quelles sont les expériences caractéristiques de votre carrière ?

  • 2005 : co-création d’un journal dans l’archipel des Comores, Kashkazi.
  • 2010-2011 : arrivée à L’âge de faire et reprise du journal en Scop.
  • Depuis 2015 : création d’actions d’éducation aux médias.
  • Depuis 2017 : portage du projet de lieu partagé de la maison commune.

6) Comment avez-vous trouvé vos premiers contrats ?

J’ai trouvé des piges et un CDD en répondant à des annonces et en écrivant spontanément à des journaux.

7) De quoi est-il question dans le journal mensuel L’âge de faire ?

L’âge de faire, c’est une équipe de huit salariés réunis pour proposer une info libre et joyeuse. Notre credo ? Mettre en lumière des alternatives concrètes en matière d’écologie, de création de lien social, d’économie et de citoyenneté. Nous voulons offrir à nos lecteurs des outils pour mettre en œuvre leurs idées. Le journal a été créé en 2005 par une association.

Aujourd’hui, nous sommes réunis au sein d’une Scop (Société coopérative ouvrière de production). Nous décidons ensemble du contenu et de la ligne éditoriale du journal. À chaque fin de mois, on se réunit collectivement pour imaginer de nouveaux sujets et projets. Le journal appartient aux huit salariés : il n’y a pas « d’actionnaire extérieur », donc une plus grande liberté de ton. Nous pratiquons également l’autogestion : pas de patron au quotidien… et huit patrons aux réunions ! On a également décidé de pratiquer l’égalité salariale.

Nous ne sommes liés à aucun parti politique, à aucun actionnaire et on déteste la pub. Seuls nos lecteurs nous font vivre. Nous sommes membres de la Coordination permanente des médias libres, qui rassemble des médias citoyens et alternatifs face aux grands groupes de presse traditionnels aux mains d’une poignée de géants.

8) Depuis quand travaillez-vous pour L’âge de faire et que faites-vous pour ce journal ?

J’y travaille depuis 2010 et mon rôle a évolué. Au départ, je m’occupais de tout le secrétariat de rédaction : relecture, corrections, allers-retours avec les pigistes, révisions de la titraille, gestion des coupes… Puis la relecture des pages montées et imprimées était partagée au sein de la rédaction. Je faisais le suivi de correction (coquilles et éléments de maquette à revoir) avec la graphiste.

Au bout de quelques années, le secrétariat de rédaction a été réparti entre un collègue et moi. Puis au fil du temps, notre fonctionnement est devenu de plus en plus horizontal et il est maintenant courant que lorsqu’un journaliste a fini un article, il sollicite l’équipe, et la personne qui a le temps se charge des relectures et corrections. C’est parfois un peu moins rigoureux, tout le monde ne maîtrise pas forcément le secrétariat de rédaction, mais dans l’ensemble les membres de l’équipe s’approprient peu à peu cette fonction qui devient de plus en plus partagée. Il nous est arrivé d’avoir des stagiaires correcteurs. Intéressant mais souvent des personnes à distance, donc compliqué à gérer. Parfois aussi des bénévoles nous ont aidés sur la relecture finale.

9) Combien de relectures sont-elles effectuées sur le journal ?

Au moins une lecture est faite avant montage, au moins deux lectures, voire trois, sont réalisées après montage. On essaie de faire en sorte que chaque article soit lu par différentes personnes.

10) Les métiers de secrétaire de rédaction et correcteur ont-ils toujours été fusionnés depuis que vous avez commencé à travailler ? De quelle manière parvenez-vous à jongler entre les deux métiers ?

Je n’ai jamais travaillé dans un média qui distinguait les deux, donc pour moi c’est naturel. Nous étions habitués à nous relire et à nous corriger entre journalistes. Il nous a été plus compliqué d’appréhender la manière de travailler très pointilleuse des stagiaires correcteurs.

11) Quels sont vos supports/outils de prédilection lorsque vous corrigez un texte (livres, sites web, correcteur informatique type Antidote ou ProLexis, etc.) ?

Internet, dictionnaire, correcteur informatique de LibreOffice… et les collègues.

12) Quel est votre pire souvenir depuis le début de votre carrière professionnelle ?

Une expérience en tant que stagiaire rédactrice. J’avais exprimé sans réfléchir des opinions sur un festival dans des articles que je voulais originaux. C’était nul et malveillant à l’égard des organisateurs, je l’ai compris après.

13) Quel est votre meilleur souvenir depuis le début de votre carrière professionnelle ?

Les trois ans à travailler presque jour et nuit pour faire vivre le journal que j’avais cofondé, aux Comores, et qui correspondait à mon rêve de jeune journaliste. Sinon, la concrétisation de la maison commune, aujourd’hui, et sa cohérence avec ce que nous racontons dans L’âge de faire, est aussi très chouette.

14) Quel regard portez-vous sur l’avenir de la profession de correcteur ?

Je ne pense pas avoir de regard spécialement pertinent et légitime sur la question. Le travail de journaliste change en permanence. Il y aura toujours du papier ayant besoin de correction de qualité. Mais sans doute en quantité moindre… Mais en réalité on n’en sait rien.

15) Quels conseils pourriez-vous donner aux futurs professionnels du secteur ?

C’est un travail délicat, parfois ingrat, où il faut à la fois savoir être ferme avec l’auteur d’un texte sur ce qui nous paraît incontournable (longueur du texte pour éviter les pages surchargées, texte dans un langage accessible…) et faire preuve de tact en laissant s’exprimer le style de chacun, même si tout n’est pas grammaticalement irréprochable, même si vous ne l’auriez pas écrit comme ça…

Quand on a bien fait son travail, soit l’auteur ne se rend compte de rien, car il retrouve la cohérence et le style de ce qu’il a fait, soit il est content, car on a amélioré son texte. Il peut aussi être mécontent si son ego a été froissé…

*Merci Lisa Giachino*

 

Mai 2021

   Mars 2021

Février 2021

 

1 commentaire

  1. Merci Coline pour ce témoignage sur un journal qui fonctionne en Scop et de manière horizontale et où la correction et le secrétariat de rédaction deviennent une tâche partagée.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *