Rechercher
Fermer ce champ de recherche.

Le tourisme durable décolle en douceur

Portrait de Sebastien à Gare de Lyon le 23-02-24

Face à la crise climatique, l’éco-tourisme s’ancre durablement dans la société française. Si le fait de voyager autrement, plus sobrement, semble consensuel, les pratiques évoluent lentement. Et ce n’est pas une question de génération.

Sébastien, 58 ans, pose en tête de quai, à la gare de Lyon, visage souriant, sac sur l'épaule, prêt à partir !
Sébastien, Gare de Lyon © Julien Dufloux

«J’ai fait 30 vols long-courriers, sans compter de nombreux sauts de puce en Europe », récapitule Sébastien, 58 ans. Comme beaucoup de personnes de sa génération, il a vécu l’avènement du tourisme de masse, de la démocratisation de l’avion et des offres low cost. Une offre dont les jeunes profitent encore aujourd’hui. En juillet dernier, Jean-Marc Jancovici, membre du Haut Conseil pour le climat, révélait que les 15-34 ans étaient les premiers consommateurs de transport aérien. En témoigne le Lillois Clément, 27 ans, a beaucoup fréquenté les aéroports pendant son échange Erasmus en Espagne. « Mais, depuis trois ans, je ne prends plus l’avion, par choix. » A son image, 77 % des Français assurent vouloir voyager de manière plus écoresponsable, selon le rapport 2023 sur le tourisme durable de la plateforme Booking. Et 46 % le font vraiment. C’est le cas de Roland, 61 ans, pour qui les voyages lointains ne se feront désormais plus qu’« à dose homéopathique ».

Le philosophe Gaspard Koenig, 41 ans, à propos de la richesse des voyages à deux pas de chez soi :

Avion, je t’aime, moi non plus

Selon une étude réalisée en 2023 par le cabinet Xerfi sur le tourisme durable, la prise de conscience écologique « modifie peu à peu les comportements des consommateurs ». Une partie d’entre eux souhaite désormais voyager en limitant son empreinte carbone. Pour 63 % des personnes interrogées par Odalys/Flower Campings dans leur baromètre 2023, le premier levier de sobriété est le mode de transport. Il n’empêche, pour beaucoup, il est difficilement envisageable de faire une croix sur les avions. Le boomer Christophe assure être « conscient de l’empreinte carbone d’un vol, mais [estime que] voyager en voiture coûte plus cher, et [que] le train n’est pas fiable ». À l’autre bout du spectre, il y a les engagés, comme Clément, lequel a réussi à convaincre ses parents de fêter leurs trente ans de mariage en Bretagne plutôt qu’à La Réunion. Et puis, il y a les pragmatiques. Inspirée par ses petits-
enfants, Marie-Thérèse, 75 ans, emprunte le plus possible Blablacar et Flixbus pour ses trajets en Europe. « Mais, s’il le faut, je prends l’avion », nuance-t-elle.

Ô temps, suspends ton vol !

Clara, 24 ans, grande amatrice de voyages en train, pose à la gare de Lyon, sur une mezzanine surplombant le Hall 1, le visage illuminé d'un large sourire, sac sur le dos, prête pour le départ !
Clara, Gare de Lyon © Julien Dufloux

Respirer, ralentir le rythme…c’est le choix de Clara, qui revient d’un rail trip – autrement dit un long voyage en train – Paris-Berlin-Prague : « Prendre le temps, se détendre, voir les paysages changer au fur et à mesure me rend heureuse. » La jeune femme a même persuadé ses parents d’embarquer pour un voyage en train à destination de Vienne. Comme elle, le quinqua Sébastien, ex-frequent flyer (voyageur fréquent en avion), perçoit désormais le chemin comme faisant partie du voyage. « Pas besoin d’attendre d’être arrivé, l’aventure débute dès que l’on part de chez soi. L’été dernier, j’ai sillonné l’Italie en train et en bus. Des trajets toujours pleins de rebondissements ! », raconte-t-il avec enthousiasme. Les lieux préservés du tourisme de masse sont aussi de plus en plus recherchés. Selon Booking, 39 % des personnes voyagent en dehors de la haute saison pour éviter la foule (contre 25 % en 2022). Elvire, ingénieure de 25 ans, fan de cyclotourisme, raconte son plaisir de s’éloigner des spots favoris des instagrameurs : « A Yport, en Seine-Maritime, il n’y a pas la fameuse arche d’Étretat, mais c’est la même falaise, c’est aussi beau. La différence, c’est qu’il n’y a presque personne. »

Un cavalier ou une cavalière, vu·e de dos, randonne à cheval sur un sentier  en pleine forêt estivale.
© Beth MacDonald, Unsplash

Le philosophe Gaspard Koenig, à propos de son long voyage à cheval et des vertus de la lenteur :

Texte : Heidi Miller – Photos : Julien Dufloux