Un projet de construction de tours de logements pour remplacer l’usine désaffectée Busso oppose la mairie aux habitants. Ces derniers militent pour la création d’une forêt urbaine.
« L’usine Busso ? Mon mari pourrait vous en parler longuement ! », déclare la propriétaire d’une maison en face de l’ancienne usine. La mairie du Pré-Saint-Gervais est à l’initiative d’un projet immobilier qui prévoit de construire, sur le site de l’ancienne usine Busso, des tours d’une centaine d’appartements. Des habitants se sont organisés en association pour que le projet ne voie pas le jour.
« Béton ou forêt ? Il faut choisir ! », « Busso = 100 % béton », clament des banderoles accrochées aux balcons, face à l’usine désaffectée. « J’ai voté pour un immeuble de quatre étages, je vais me retrouver avec une tour sur ma placette », déplore une habitante. Cette mobilisation, le maire de la ville ne la voit pas d’un bon œil. Dans un article du journal Les Échos, publié le 8 décembre 2023, Laurent Baron – que ses opposants appellent Laurent Béton – fustige la « procédure » des réfractaires au projet qui, en attendant, empêchent la ville « de planter le moindre arbre ». Pour Anne-Françoise de l’association Le Pré en transition, ce projet qui, selon la mairie, prévoit de construire « presque autant de jardins que d’immeubles » est une « hypocrisie », à contre-courant des recommandations de lutte contre le réchauffement climatique. D’autant que le permis de construire a été déposé juste avant l’entrée en vigueur de la nouvelle réglementation européenne (dite RE 2020), qui impose la construction de bâtiments durables, de basse consommation et de panneaux solaires notamment. Or, le projet remporté par le promoteur Cogedim ne comporte rien de tout cela.
Pétition, manif et recours
Ces tours vont « intensifier encore l’urbanisation dans une ville déjà dépourvue d’espaces verts », affirme Anne-Françoise. Le maire a eu beau tenter de déminer la situation, en organisant une consultation publique en amont du projet, cela n’a pas été suffisant. « Cela s’apparentait plutôt à un choix entre un mur gris ou un mur rose », précise la militante.
Une pétition a alors tourné sur le marché : 3 000 signatures. « Sur 17 000 habitants, c’est pas mal ! », sourit-elle. Après Le Pré en transition, dont le premier recours a été annulé, un collectif d’habitants, à son tour, attend une décision du tribunal administratif. « Il y a quinze jours, il y a eu une manifestation », se souvient le vendeur du bar-tabac. De l’autre côté de la rue, dans l’agence immobilière, la prudence est de mise : « On est tous pareils, on ne veut rien à côté de chez nous, mais il y a un manque cruel de logements au Pré. » « On est bien ici, c’est normal que les gens veuillent y habiter », conclut un habitant.
Texte : Emmanuelle Milon – Photos : Lucas Pialot