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Aux Lilas, le nom de la future station Serge‑Gainsbourg divise les habitants

Panneau de l'esplanade Serge Gainsbourg au Lilas

Les Lilas ouvriront la station de métro Serge‑Gainsbourg début 2024. Certains regrettent le choix d’un artiste connu pour des faits de violences et de misogynie. Une pétition lancée le 26 novembre en protestation connaît un fort succès.

« Serge‑Gainsbourg dans le métro, c’est non : il faut changer le nom de la station » : en lançant cette pétition sur la plateforme change.org le 26 novembre dernier, Marie n’imaginait pas qu’elle prendrait une telle ampleur. Plus de 13 200 personnes ont déjà signé. Le nom de la station Serge-Gainsbourg, qui ouvrira au printemps prochain aux Lilas, ne fait pas l’unanimité. D’après Marie, donner le nom de cet artiste « misogyne notoire et chantre de l’inceste » est inconcevable. La jeune femme s’appuie sur les faits de violences révélés par Jane Birkin, ainsi que sur les paroles de Lemon Incest, et a lancé la pétition « pour faire réfléchir ». « Quand je vois le nombre de personnes qui ont signé, je me dis que ce combat dépasse la question du féminisme. Il y a des gens de tous les âges », explique-t-elle.

Avis tranchés

Même si la mairie n’est pas la seule à décider, Marie espère la convaincre de changer le nom : « Grâce au succès de la pétition, j’ai obtenu un entretien début janvier. La mairie se dit féministe, en lutte contre les violences. Je ne vois pas quels arguments elle pourrait avancer. » La jeune femme envisage également de rencontrer Île-de-France Mobilités, responsable du prolongement de la ligne 11.

Aux Lilas, les usagers sont partagés. « Les gens font des polémiques pour tout et rien. Cette station, elle lui revient de droit. C’est lui, Le Poinçonneur des Lilas ! » s’exclame Arlette, 83 ans. Quant aux propos du chanteur, elle les relativise : « On dit tous des bêtises parfois. » Noémie, elle, aimerait que le nom change : « Je comprends très bien le point de vue de cette pétition. C’est rendre hommage à un homme violent », explique l’étudiante de 19 ans.

À gauche, Arlette, 83 ans, et à droite, Noémie, étudiante, ont des avis opposés au sujet de la polémique. © Amélie Dibon

Sur Internet, les avis divergent également. Si Marie a été surprise du nombre de soutiens, elle ne s’attendait pas non plus à autant de virulence de la part de ceux qui ne partagent pas son avis. La jeune femme regrette l’absence de dialogue : « On m’accuse de vouloir faire de la cancel culture. Il ne s’agit pas de ça. J’aimerais expliquer pourquoi les actes et les paroles de Gainsbourg sont problématiques. Parler d’inceste, même de façon suggestive ou fantasmée, c’est contribuer à le normaliser. »

En attendant la décision finale, Marie espère que la pétition continuera à toucher de plus en plus de monde, « pour faire pression ». Elle continuera, quelle que soit l’issue de la discussion, à exprimer son désaccord : car choisir un homme violent, comme elle l’écrit dans sa pétition, « dit quelque chose de notre société ».

Texte : Sofia Hullot-Guiot – Photos : Amélie Dibon