Trois questions au jeune comédien qui interprète Alex dans La Tendresse, la dernière pièce de Julie Berès à l’affiche des Bouffes du Nord du 6 au 23 décembre.
Dans le spectacle La Tendresse, Alexandre Liberati (28 ans) incarne Alex, un jeune homme qui questionne la place de l’homosexualité dans les groupes masculins.
Comment avez-vous rejoint ce projet théâtral ?
Je connaissais le travail de Julie Berès, l’autrice et metteuse en scène de La Tendresse. En 2019, j’ai été bluffé par sa pièce Désobéir, qui raconte comment les femmes tentent de se libérer des carcans du patriarcat. Lorsque j’ai appris qu’elle avait un nouveau projet sur les effets du patriarcat, mais, cette fois-ci sur les hommes, j’ai foncé. Il y a eu plusieurs auditions et un stage où nous avons débattu des thèmes du spectacle. Nous nous sommes beaucoup livrés. La pièce est un mélange de jeu, de danse et de chant. Nous n’avons pas tous eu un parcours de danseur et nous nous sommes enrichis des pratiques de chacun. La première représentation remonte à novembre 2021.
La pièce est très incarnée par ses comédiens, dont les personnages portent d’ailleurs leurs vrais prénoms. Y a-t-il une part de vous dans Alex ?
Tout à fait. Julie Berès aime jouer avec la frontière entre réalité et fiction. Avec Kevin Keiss, Lisa Guez et Alice Zeniter, elle a écrit un réservoir de textes que nous avons étoffé avec des propositions issues de notre construction personnelle en tant qu’hommes. C’était passionnant car nous sommes d’âges, de milieux, de religions différentes, avec des expériences diverses. Mais on sentait à quel point le patriarcat se retrouve dans toutes les strates de la société. La seule exception est le personnage que joue Tigran [Mekhitarian]. Son discours misogyne était nécessaire pour la pièce, mais ne reflétait pas le vécu des acteurs. Certaines thématiques, comme le rapport à la pornographie ou la question du consentement, proviennent des témoignages que les auteurs ont recueillis en amont de l’écriture. Cette scène a d’ailleurs suscité beaucoup de débats entre nous et a été réécrite plusieurs fois.
Comment échangez-vous avec le public ?
L’incarnation crée un sentiment de réalité pour le public, qui nous accorde sa confiance et nous permet de jouer avec lui. On recherche chez lui une vibration : on l’interpelle, on le secoue parfois. Les questionnements divergent, les jeunes s’ouvrent aux notions de genre et de sexualité. Lors d’une rencontre avec des lycéens, certains nous ont remerciés d’aborder le sujet de la pornographie. La première scène démarre avec une chanson du rappeur Jul. C’est drôle de voir comme les jeunes sont tout de suite embarqués, alors que le public plus âgé entre dans la pièce petit à petit. Mais, à la fin, tout le monde a pris le train.
Texte : Sofia Hullot-Guiot – Photos : Yohann Cordelle