Pré-Saint-Gervais : il s’engage auprès des SDF au nom du « street love »

Photo d'un sans-abri
Portrait d’un sans-abri suivi par l’association. La photo orne la table basse du local de La Rue tourne. © Paul Delamare

Grâce à une photo postée sur Twitter, Youcef Belhaddad retrouve une ancienne camarade d’école en contact avec La Rue tourne et rejoint l’association. Tisser des liens, écouter plutôt que distribuer de la nourriture, apporter de la chaleur humaine lors des maraudes, c’est ce que recouvre cet anglicisme.

par Hamza Chennaf

« À Paris, on ne meurt pas de faim mais de solitude », fait valoir Youcef Belhaddad. Le principe du street love, c’est d’assumer le choix de ne pas distribuer de nourriture mais des tentes, des vêtements, des radios et, surtout, du temps et du lien social. Les bénévoles tissent des liens avec les bénéficiaires sur le long terme, notamment à l’aide des téléphones portables offerts aux personnes démunies. Ce qui a permis à certains de trouver un logement, un travail. De se réinsérer socialement.

Dès l’accueil, Youcef sait vous mettre à l’aise. Avec le partage comme devise, et un bon café pour vous réchauffer. « On distribue le meilleur café de Paris, ce sont ceux qui vivent dans la rue qui le disent », assure-t-il. Une brosse dans la main droite, un flacon d’huile d’argan dans la gauche, le jeune homme recoiffe sa barbe couleur ébène.

Tranquillement installé sur l’un des larges canapés de l’association La Rue tourne au Pré-Saint-Gervais, Youcef raconte son engagement dans le milieu associatif depuis près de dix ans. Il y a trois ans, ce manager commercial dans un cabinet d’optimisation fiscale, décide de venir en aide aux sans domicile fixe grâce au street love.

Ainsi, en novembre 2018, Youcef découvre un tweet d’Agy, l’une des cofondatrices de La Rue tourne. Elle répondait à la maire de Paris, Anne Hidalgo, à propos des femmes sans domicile fixe de la capitale. Sur une photo postée par Agy, Youcef reconnaît Kamir, une femme SDF, qui était dans son école primaire. « Quand j’ai vu son visage, j’ai appelé des amis d’enfance pour qu’ils me fassent parvenir des photos de classe, puis j’ai contacté Agy afin de revoir Kamir. »

« On ne cesse de s’enrichir les uns, les autres »

Deux semaines plus tard, Youcef se retrouve sur le terrain avec l’équipe de La Rue tourne. « Depuis, l’aventure continue » exprime-t-il en souriant. Cinq mois après cette anecdote, Youcef a intégré le bureau de l’association et est devenu référent en maraude dans les différents quartiers de la ville lumière. C’est lui qui est chargé de piloter les tournées et de coordonner les instructions entre les bénévoles.

Le Parisien de 31 ans a été séduit par la diversité des acteurs de La Roue tourne. « Il y a ici des chrétiens, des athées, des juifs, des musulmans, des jeunes, des enseignants… c’est tellement beau ! On ne cesse de s’enrichir les uns, les autres », s’enthousiasme-t-il. Mais ce qui fait l’originalité de cette association, c’est aussi son mode de fonctionnement grâce à des maraudes originales baptisées street love.