Du 31 octobre au 2 novembre dernier, s’est réuni à Hammamet, Tunisie, le Conseil International (CI) du Forum Social Mondial (FSM). Mais alors qu’est-ce que ça peut bien vouloir dire tout ça ? C’est quoi le Conseil International ? Et le Forum Social Mondial ? Effectivement, quelques éclaircissements s’imposent. Alors, commençons par le commencement…

Il était une fois, un groupe de gens qui trouvaient que le monde ne tournait pas tout à fait rond pour plusieurs raisons : des guerres un peu partout, des gens qui n’ont pas à manger, d’autres qui meurent en tentant d’aller vivre ailleurs, des travailleurs exploités, des paysans sans terre… On peut faire une sacré liste, mais à un moment il faut mieux s’arrêter sinon on n’a pas fini ! Donc le monde n’allait pas bien. Alors ils se sont demandé pourquoi. Et ils ont compris qu’il y avait un dénominateur qui mettait toujours son grain de sel dans la soupe, la mondialisation (ou globalisation) et plus précisément encore la mondialisation néolibérale. Pour eux, un autre monde était possible (et même nécessaire). Mais comment faire pour changer de monde ? Agir chacun dans son coin, ça ne semblait pas suffisant. Parce que se battre localement contre un adversaire qui agit partout sur la planète, c’est bien mais ça ne suffit pas. Alors ils ont pensé qu’il faudrait qu’ils agissent tous ensemble partout sur la planète pour réussir à faire changer les choses. Mais pour cela il leur fallait un endroit où se rencontrer…

Porto Alegre

Porto Alegre

Ainsi naquit en l’an 2001, au beau milieu du Brésil (à Porto Alegre précisément), le Forum Social Mondial. Se serait le rendez-vous de tous ceux qui luttent pour un autre monde. Un espace de rencontres, de convergences, de solidarités, de luttes et d’élaboration d’alternatives à ce monde. Aujourd’hui, 13 ans plus tard, le petit forum a pris son envol, il a voyagé sur plusieurs continents, il a fait des petits (les forums régionaux et leurs cousins, les forums thématiques). Et il a fini par s’installer au nord de l’Afrique. En Tunisie (et dans sa capitale, Tunis). Et oui, il est venu une fois et ça lui a plus. Alors il a décidé de rester un peu. C’est comme ça que deux ans après Tunis 2013, Tunis 2015 sera le deuxième FSM à avoir lieu à Tunis.

Mais un FSM, ça ne marche pas tout seul. Il faut des gens pour s’en occuper. Ces gens, ils se retrouvent dans le cadre du Conseil International, celui-là même qui s’est réunit à Hammamet (en Tunisie, vous comprenez pourquoi maintenant ?). Ils se réunissent, ok. Mais concrètement qui sont-ils ? Et qu’est-ce qu’ils font ? Les membres du CI, ce sont les représentants d’associations impliquées dans l’organisation du FSM. Ils viennent d’un peu partout : du Brésil, du Canada, du Sénégal, de Côte d’Ivoire, d’Italie, du Maroc, de Tunisie, de Palestine, de France, d’Allemagne, de Taïwan…

Et quand ils se réunissent, d’abord ils parlent de la situation du pays où ils se trouvent, pour comprendre ce qu’il s’y passe et pouvoir en parler ailleurs. Cette fois-ci par exemple, beaucoup n’étaient pas au courant de la situation en Tunisie, des éléctions qui venaient d’avoir lieu…Puis vient le moment de débattre sur le processus du FSM. Où en est-il? qu’est-ce qui marche ? qu’est-ce qui marche moins ? Tout le monde est relativement d’accord pour dire qu’il faut changer la formule, qu’il y a quelque chose qui ne fonctionne plus tout à fait. Mais trouver ce que c’est et comment y remédier s’annonce plus compliqué. Pour certains, le monde -et le capitalisme avec lui- a trop changé, trop vite, et il faut réussir à reconstruire et repenser la lutte contre le système capitaliste et néolibéral globalisé. Pour d’autres, c’est le FSM qui ne s’est pas assez renouvelé, qui s’est trop éloigné du cœur des luttes et qui, par conséquent est un peu déconnecté des réalités du terrain… Mais en l’absence d’un autre espace où faire vivre l’alternative au système, autant continuer à utiliser le FSM et les ressources qu’il renferme. Alors vient la discussion sur la suite des évènements. 2015 se fera à Tunis, c’est sûr. Pour ce qui concerne 2016, par contre était au cœur des discussions de ce weekend (en plénière ou dans les couloirs et jusque tard dans la nuit). L’idée était d’organiser un FSM 2016 à Montréal (Canada), qui serait le premier à se dérouler dans un pays du Nord. Mais ce projet ne fait pas l’unanimité au sein des mouvements Canadiens et Québécois impliqués dans la dynamique des forums. Après plusieurs jours de discussions, de « tractations », de médiations… Il sera finalement décidé d’attendre Tunis pour décider de ce qu’il se passera ensuite.

Puis vient le moment de discuter de l’état du Monde. Des guerres qui fleurissent au Machreq et en Ukraine notamment, de la crise financière qui marque une nouvelle avancée de la mondialisation néolibérale, et des peuples qui luttent pour la démocratie, pour leurs droits (de travailleurs, de paysans, d’exclus, de minorités…), pour l’environnement et contre le changement climatique…  Parfois, les membres du Conseil International font des déclarations sur des évènements particuliers (cette fois-ci, il s’agissait du départ du Président burkinabé, de la solidarité avec les Kurdes de Kobanê, de la mort de Rémi Fraisse en

Hammamet

Hammamet

France, et des étudiants Mexicains kidnappés). Et puis le soir, ils se détendent un peu en chantant des chansons de leurs pays respectifs, parce qu’il faut bien se détendre après tout ça. À la fin, ils se donnent rendez-vous la prochaine fois et rentrent chez eux avec plein de travail à faire, épuisés par plusieurs jours de réunion (et de discussions/négociations tardives), mais requinqués par de nouvelles rencontres, des découvertes, et par l’idée qu’ils vont bien finir par le construire cet autre monde. Le problème c’est de savoir quand…