Un week-end dans le Moyen Atlas marocain : un autre regard du Maroc Depuis le début du volontariat, mes week-ends se déroulent en dehors de Rabat (capitale administrative) : entre Casablanca (capitale économique), Kénitra et le Moyen Atlas. Tous ces week-ends sont bercés entre les activités du Forum des Alternatives Maroc (FMAS) , des échanges avec les membres d’associations locales et la découverte du pays, son environnement et ses populations. Retour sur ce dernier week-end, à la rencontre du milieu rural marocain. Ce week-end : départ pour le village d’Afourer, au pied des montagnes, dans la région de Tadla/Azilal, situé au centre du Maroc. J’accompagne trois membres du portail Internet e-joussour [1] pour une formation adressée aux associations locales de la région. Voici les premières impressions d’un week-end au cœur du monde rural : entre la découverte du village d’Afourer et de sa région et un bref aperçu d’associations de la région. Le village d’Afourer et ses alentours La région de Tadla/Azilal est, majoritairement, rurale, située au milieu des vergers d’oliveraies et d’orangers sur l’ensemble de la plaine de Tadla [2]. La région est connue pour ses industries de phosphate et ses raffineries de sucre, grâce à l’exploitation de la betterave à sucre. Cette région est reconnue pour le dynamisme de ses activités économiques. Pourtant, en se promenant à Afourer, mes impressions ne sont pas à la hauteur de la réputation de la région. Peut être qu’Afourer est un village à part... On peut observer un manque d’infrastructures criantes. Seule la rue principale est goudronnée, les autres rues sont faites de terres et de troues, dues, entre autres, aux précipitations importantes de cette année. Beaucoup de maisons restent en construction. Cela n’empêhcent pas les personnes d’y habiter. Au pied d’Afourer, deux grands tuyaux étendues sur la montagne où il est inscrit Dieu, Patrie, Roi en arabe, comme sur toutes les montagnes du Maroc situées aux entrées de villes et villages. Ces deux tuyaux servent à produire l’électricité par l’eau venant du barrage Bin El Widane, situé de l’autre côté de la montagne. C’est l’Office National de l’Electricité (ONE) qui en est l’entrepreneur. L’ONE est une entreprise publique. Un animateur de l’association al Intilaka [3] me fait part d’une certaine mélancolie. Il me fait bien comprendre que l’Office Nationale de l’Electricité ne bénéficie pas aux habitants d’Afourer. L’absence d’activité économique à Afourer amène les jeunes à partir, soit pour faire des études à Beni Mellal, Casablanca ou Marrakech et y trouver un emploi, soit à migrer vers l’Europe, essentiellement l’Italie, en traversant la Lybie. Cet animateur regrette cette situation. Lui-même est parti d’Afourer, pour faire une année d’étude en linguistique mais est revenu, se demandant ce qu’il pouvait faire à Afourer. Aujourd’hui, il est animateur de l’association Al Intilaka et réalise toutes les calligraphies de l’association. Il explique le désintérêt des jeunes d’Afourer pour la chose publique du fait d’une absence de lieu d’échanges, de rencontres. Outre la maison des jeunes, peu dynamique, il n’existe pas d’endroit pour des activités sportives et culturelles. Pour S., une action associative des jeunes pourrait contribuer au dynamisme de la citoyenneté à Afourer. Il existe plus d’une trentaine d’associations dont une dizaine est réellement dynamique. L’importance du nombre d’association démontre la volonté de résoudre des problèmes de la ville comme un fort taux d’analphabétisme. Bref aperçu de la démarche participative des associations de la région d’Azilal Pour continuer la visite de la région, nous nous sommes rendus dans la ville d’Azilal. Azilal est la principale ville de la région, située de l’autre côté de la montagne. En quittant les plaines Tadla, nous avons trouvé les montagnes enneigées et la fraîcheur de l’altitude [4]. Après les péligrinations du grand taxi [5] à travers la montagne, nous découvrons une grande ville, dotée de routes fraîchement construites. Ce moment à Azilal a été l’occasion de rencontrer des associations locales de la région et de me rendre compte, plus concrètement, de leur travail. Le réseau Tada, regroupant une trentaine d’associations Amazigh [6], se rencontrait pendant trois jours pour une formation de renforcement des capacités du travail des animateurs de développement. A l’initiative de l’INDH (Initiative Nationale pour le Développement Humain) [7] , la formation consistait à promouvoir et renforcer la culture Amazigh à travers le tissu associatif existant de la région. Trois approches ont été abordées : l’approche participative, l’approche genre et l’approche droits. L’approche participative a été pratiquée par un diagnostic participatif avec la population de la région d’Azilal. Plusieurs groupes ont été formés. Groupe jeunes, groupe de femmes, etc. Les associations ont utilisé le diagnostic de manière à analyser les préoccupations ressorties et à capitaliser sur les expériences des unes et des autres en priorisant et constituant des objectifs précis. En visualisant la vidéo du diagnostic, c’est le « faire ensemble » qui est de mise. Les associations se sont servies de la rencontre avec la population comme une base de leur réflexion lors de la formation. Le diagnostic a permis aux habitants de la région de s’exprimer et de réfléchir sur leurs conditions de vie. Cette rencontre avec les associations du réseau Tada m’a conforté dans l’idée qu’il y a une tendance, en tout cas, la volonté de rendre le travail associatif davantage participatif et méthodique. Alors que des membres d’Action Jeunesse (groupe jeune du FMAS) viennent de recevoir une formation sur le plaidoyer, sur les méthodes participatives à pratiquer lors de leurs activités, je retrouve les mêmes préoccupations dans la région d’Azilal. L’approche participative est la base du travail associatif. Il est toujours difficile d’impliquer les populations sur des questions sociétales. Des formations de renforcement des capacités selon l’approche participative semblent nécessaires pour un travail au plus proche des personnes dans le besoin. Ainsi, que ce soit dans le Moyen Atlas ou à Rabat, le renforcement associatif travaille sur des thématiques communes malgré le fait que les besoins soient différents. Ce week-end dans le Moyen Atlas m’a permis de découvrir une autre facette du Maroc. Le Maroc ne se réduit pas aux villes comme Casablanca connue et reconnue pour son dynamisme et son architecture. J’ai pu découvrir un tout autre paysage, fait de montagnes, de plaines à perte de vue, de maisons aux façades rosées et de champs d’oliviers et d’oranges. La population est aussi différente, avec laquelle j’ai ressentie plus de méfiance à ma présence. Les deux jours m’ont permis d’avoir un bref aperçu et de me donner l’envie de connaître davantage la population sur une période plus longue. [1] E-joussour est un portail Internet pour et par les associations du Maghreb et du Machrek. Ce portail contribue à une participation accrue des acteurs des sociétés civiles des régions Maghreb/Machrek par la production d’analyses sur la mondialisation et ses conséquences ce qui leur permet d’avoir davantage de visibilité Internet, et de permettre aux populations d’avoir accès à ce type d’information. Le FMAS est l’initiateur du projet, en partenariat avec Oxfam Novib et Alternatives/AlterInter. Pour en savoir plus : http://www.e-joussour.net/fr/node/36, [2] La population de la province d’Azilal est à 90% rurale selon l’étude de cas sur le développement durable de la province d’Azilal de la FAO. [3] Al Intilaka-AIEDECA œuvre pour une citoyenneté juste et solidaire à Afourer. Elle travaille avec les jeunes et les femmes et a ouvert une crèche. [4] Azilal se trouve à 1 350 mètres d’altitude. [5] Le grand taxi transporte six personnes, généralement dans une Mercedes blanche des années 1980 et effectuent des trajets souvent longs. On distingue les grands taxis des petits taxis, ces derniers restant dans la ville [6] Les Amazighs sont le peuple autochtone de l’Afrique du Nord, disposant d’une langue, d’une culture, et d’une histoire propres. "Amazigh" est le nom que se donnent les Berbères et qui signifie "Homme libre". Le mot berbère vient du Latin "Barbarus", utilisé par les Romains pour désigner les populations qui ne parlaient pas leur langue.Le peuple amazigh est aujourd’hui réparti principalement entre le Maroc (environ la moitié de la population totale amazighe) et l’algèrie (le tiers). Le reste se repartit entre la Tunisie, la Lybie, Siwa (Egypte), l’archipel canarien et les populations Touregs (Niger, Mali, Mauritanie). Le peuple amazigh a connut de nombreuses marginalisations. [7] L’INDH est une initiative gouvernementale, lancée en 2005. Pour en savoir plus : http://www.indh.gov.ma/fr/index.asp, |
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