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Haïti / Exclusion urbaine /

Lire Haïti entre les cultures
13 décembre 2007 par Lucie Co

Après quelques jours de festival littéraire à Port-au-Prince, se dresse le paysage de la culture littéraire haïtienne. Prolixe, elle est traversée des cultures caraïbes, européennes, africaines et américaines. Ses mots résonnent de la lutte dans la quête de l’identité.

Loin des cénacles hautains des écrivains confidentiels, les écrivains présents à Port-au-Prince le week end dernier ont eu à coeur d’échanger avec le public. Un public jeune souvent, d’étudiants et lycéens haïtiens.

Au centre des débats des auteurs invités, la question de l’identité. Haïti se prête à merveille à des échanges sur ce thème par des auteurs guadeloupéens, congolais, maliens et haïtiens bien sûr ! Pourquoi ? D’abord parce que la diaspora haïtienne est immense aux Etats-Unis, au Canada et en France. Elle pèse de son poids dans les rapports des Haïtiens avec l’étranger. Bon nombre d’entre eux ont vécu ou ont de la famille sur "lot bo" (à l’étranger).

Ensuite, parce que la langue française interroge sans cesse l’identité des écrivains des anciens pays colonisés. Car les lecteurs haïtiens lisent et parlent très majoritairement le créole, comme les Maliens le peul ou le songhaï. Qu’est-ce alors qu’écrire en français ? Et qu’est-ce que l’héritage colonial ? Quel est le rapport aujourd’hui de cet héritage avec la réalité française ?

La soumission dans la domination linguistique n’est plus à l’ordre du jour. Les écrivains présents reconnaissent unanimement la langue française comme faisant partie de leur histoire. Mais ils interpellent fort justement la France sur sa cécité vis-à-vis de la littérature francophone. Ce monde d’écrivains est presque contraint de vivre en dehors de la sphère franco-française. Sans se positionner comme des auteurs engagés, Maryse Condé [1], Alain Mabanckou et les autres portent néanmoins haut l’étendard du mélange des cultures Afrique-Caraïbe-Occident et permettent la reconnaissance des histoires singulières de chaque pays et de leurs peuples. Port-au-Prince, capitale du pays où "la négritude s’est mise debout pour la première fois" [2], les écoute apaisée.


[1] Maryse Condé, auteure guadeloupéenne, a vécu 12 années en Afrique de l’ouest à la recherche des racines de la culture caribbéenne. Elle a présidé le Comité pour la mémoire de l’esclavage.

[2] Aimé Césaire faisant allusion à la révolution haïtienne au cours de laquelle Haïti, terre de grandes cultures de canne à sucre employant une importante main d’oeuvre d’esclaves ouest-africains, a conquis son indépendance face aux colonisateurs français. Haïti est indépendante depuis 1804.




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