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Jouez pour un monde meilleur
2 mars 2009 par Johanne

Ou comment une loterie finance des dizaines d’ong aux Pays-Bas

Créée en 1989 aux Pays-Bas, la Loterie Nationale des Codes Postaux (Nationale Postcode Loterij) s’est dès le départ fixée pour objectif de "contribuer à un monde plus propre et plus juste". Comment ? Chaque année, cette grande loterie dite de bienfaisance reverse la moitié de ses gains à des organisations qui s’efforcent de protéger l’environnement ou de venir en aide aux victimes de la guerre, de la violence ou de la pauvreté. Les joueurs misant au moyen de leur code postal sont parfaitement informés de l’objet de cette loterie.

Très récemment, 50% des gains accumulés en 2008, soit 244, 3 millions d’euros, ont ainsi été reversés à 64 organisations bénéficiant régulièrement de ces donations à caractère privé. Le Haut Commissariat pour les Réfugiés (HCR) fait, par exemple, partie des heureux élus et ce depuis plusieurs années : 1,6 millions d’euros lui ont été offerts en février 2009.

L’augmentation en 2008 de 8,5% du montant de ses gains par rapport à 2007, soit 18,5 millions d’euros, a en outre permis à la Loterie de financer une série de nouveaux projets. Parmi les nouveaux gagnants, on trouve dans la catégorie "Etres Humains" le programme Blinn.

2,35 millions d’euros pour Humanitas-Blinn

Le programme Blinn a été créé en 1999 par les deux ong hollandaises Humanitas (organisation humaniste fondée sur le volontariat) et Oxfam Novib (organisation luttant contre la pauvreté et ses conséquences). Ce programme vise à améliorer la situation des victimes d’exploitation et/ou de traite aux Pays-Bas. La Loterie vient de lui verser 2,35 millions d’euros afin que son équipe soit en mesure, au cours des 3 prochaines années, de transmettre les fruits de son expertise aux autres ong hollandaises susceptibles de venir en aide aux victimes de traite et/ou d’exploitation.

En ces temps où de plus en plus d’associations ont du mal à se maintenir hors de la faillite faute de subventions (d’Etat) suffisantes, il se pourrait bien que les jeux de hasard soient finalement la voie de financement la moins hasardeuse.

Libertés et dignité des femmes en Inde : lutter, toujours et encore.
16 février 2009 par Valérie

Un incident et ses répercussions font actuellement la une des journaux en Inde : le 24 janvier 2009, à quatre heure de l’après-midi, une quarantaine d’extrémistes hindous se sont introduits dans un pub de la ville côtière de Mangalore (Karnataka) et ont agressé verbalement et physiquement une douzaine de jeunes femmes, auxquelles ils reprochent de violer les « normes traditionnelles indiennes de la décence ».

Cette attaque fait partie d’une série de campagnes et d’actions violentes orchestrées par des groupes fondamentalistes hindous réactionnaires (parmi lesquels la Shiv Sena, la Shri Ram Sena, le Bajrang Dal) qui s’opposent à la modernisation de l’Inde dans le sens des libertés individuelles (surtout quand il s’agit de celles des femmes) et de la tolérance religieuse, au nom d’une soi-disant « culture hindoue », qui serait la seule culture indienne légitime.

Il est particulièrement inquiétant de voir que dans les Etats gouvernés par le parti nationaliste hindou BJP (Bharatiya Janata Party), ces groupes extrémistes dits de « vigilance » se considèrent hors d’atteinte du pouvoir judiciaire et autorisés à défier en tout impunité la loi démocratique, s’érigeant en « police morale », tandis que la police officielle se distingue par sa passivité. En effet, dans les États où le BJP est au pouvoir, les liens entretenus avec ces groupes lui interdisent de fait toute condamnation claire. Quant au parti du Congrès, il est, lui aussi, resté relativement silencieux sur la question. Dans une société encore largement patriarcale et conservatrice, aucun parti politique n’ose condamner fermement ces actes par crainte de s’aliéner de nombreux électeurs, en particulier à la veille d’élections générales. La faible participation des citoyens aux manifestations organisées par les organisations de défense des droits des femmes témoigne de l’ancrage de telles vues dans les mentalités indiennes.

Mais, à n’en pas douter, ces mouvements de réaction face à la modernisation et à la démocratisation de l’Inde, qui impliquent l’accès croissant des femmes à l’éducation, au monde professionnel et à une certaine indépendance, sont appelés à être de plus en plus fréquents si les politiques n’affirment pas haut et fort la liberté et l’égalité des hommes et des femmes en Inde, ainsi que le caractère séculariste du pays, et si l’appareil judiciaire ne s’applique pas à juger en toute indépendance ces atteintes inacceptables aux droits humains les plus fondamentaux.

Dans la capitale Delhi, un groupe de quatre organisations de défense des droits des femmes (Nirantar, Jagori, Saheli, Sama et Stree Adhikar Sangathan) se sont mobilisées en organisant, le 3 février dernier, un rassemblement de protestation contre l’incident de Mangalore afin de dénoncer ces manifestations sexistes et fondamentalistes portant en elles les germes du totalitarisme : « L’Inde n’a pas de place pour les forces fascistes ». Elles ont également exprimé leur colère face à l’absence de réaction de la part de l’administration, de la police et des partis politiques. La commission nationale pour les femmes est particulièrement épinglée après que la responsable de l’équipe chargée d’établir les faits a affirmé que la responsabilité de tels incidents en incombait au comportement des jeunes femmes.

Cette mobilisation des associations et de l’opinion publique est absolument nécessaire. Elle ne doit cependant pas faire oublier que loin de la médiatisation qui a entouré cet incident et qui concerne la nouvelle classe moyenne indienne (d’où, sans doute, l’intérêt des médias pour cette affaire), la condition générale des femmes en Inde, de quelque classe, caste ou religion qu’elles soient, n’est guère enviable (les exceptions sont heureusement de plus en plus nombreuses).

Rarement reconnues en tant qu’individu à part entière, les femmes indiennes n’existent qu’à travers leur seul statut d’épouse ou de mère et sont les victimes, le plus souvent silencieuses et impuissantes, de violences psychologiques et physiques : éliminées à la naissance ou dans le ventre de leur mère, harcelées voire assassinées pour ne pas avoir apporté une dot suffisante, objet permanent, et ce dès l’enfance, du désir et de la volonté de domination des hommes. Le chemin vers l’épanouissement et la réalisation de leurs propres désirs est semé d’obstacles difficilement franchissables. Considérées par ailleurs comme les gardiennes et garantes de la « culture », de la « tradition » et de l’« honneur » au sein du foyer, elles ne disposent que d’une liberté restreinte, tandis que les hommes, qui seraient exonérés de cette charge pour on ne sait quelle raison, jouissent d’une liberté individuelle ou, à tout le moins, d’un pouvoir de décision bien plus grand, dans l’espace privé et l’espace public.

Au cœur de l’incident de Mangalore se trouve donc la question de la place des femmes dans la société indienne. Le prétexte de « la défense de la culture et de la tradition » a été utilisé depuis des siècles pour justifier la restriction des droits des femmes et de leur liberté de choix. Comme l’affirme l’écrivaine et journaliste engagée Kalpana Sharma [1] : « En dernière analyse, ce n’est pas une question de tradition mais de garder les femmes sous contrôle. […] Le statut des femmes est un signe de maturité d’une société. »

D’où le travail acharné et difficile des associations telles que Nirantar à Delhi ou Vimochana à Bangalore, se battant pour défendre les droits fondamentaux des femmes, faire évoluer les mentalités, donner aux femmes les plus démunies les moyens matériels et intellectuels d’avoir davantage de prise sur leur vie et lutter contre l’apathie générale face aux violences qu’elles subissent quotidiennement, qui sont avant tout une manifestation particulière des structures plus larges du pouvoir et de la violence.

[1] Kalpana SHARMA, « In the name of culture ? », The Hindu, Feb 08, 2009

Quand Houria redevient Sandra ou la quête d’un père sans papier au Maroc pour récupérer son enfant.
8 février 2009 par Nadia

Cette brève a pour objet d’évoquer (succinctement) une situation juridique compliquée, impliquant différents acteurs (justice marocaine, orphelinat, ambassade) et révélant différentes carences dans l’assistance des ambassades à leurs ressortissants et dans l’accès à la Justice au Maroc.

C’est la naissance d’une petite fille : Sandra. Le père est là mais en situation irrégulière. La mère décède en couche avant de pouvoir établir l’acte de naissance.

L’acte de naissance est établi par l’ambassade au nom de Sandra … Le père est là mais son nom n’apparait pas.

Vivant maritalement, les deux concubins [1] ne sont cependant pas mariés. La paternité est à prouver...

L’enfant est placé en orphelinat... et est désormais appelé "Houria" [2].

Le rôle de l’ambassade

La reconnaissance de paternité est du ressort de cet Etat mais les ressortissants concernés sont sur un territoire étranger... où le "problème" migratoire concernant les subsahariens focalise sur la lutte contre l’immigration/émigration clandestine et la traite des être humains.

Sous l’autorité du chef de mission diplomatique [3] la mission consulaire est chargée d’assurer une mission générale de défense et de protection des intérêts du pays et de ses ressortissants, ainsi que d’une mission d’information et d’appui à la mission diplomatique dont elle relève. Elle est chargée notamment des questions relatives à l’état-civil et à l’émi-immigration, de la transmission et de l’exécution des actes judiciaires (commissions rogatoires, etc...), de l’assistance et de l’encadrement des ressortissants, notamment des mineurs et des incapables.

Avoir recours à son ambassade pour être assisté, lorsque l’on est en situation administrative irrégulière, implique de se signaler, d’être localisé, identifié et de courir le risque d’être plus facilement reconduit dans son pays d’origine en cas d’arrestation par les autorités marocaines (parce que connu). Différents ambassades subsahariennes collaborent au programme d’"aide aux retours volontaires" de l’OIM (Organisation Internationale de la Migration) [4].

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Quelques informations concernant le programme de l’OIM Maroc

De plus, certaines ambassades africaines interviennent parfois pour le rapatriement de leurs compatriotes "clandestins", comme cela fut le cas en 2005 [5]. "Il faut savoir qu’ils sont des milliers à squatter ainsi au Maroc. Le problème a donc été pris à bras le corps et il s’agit de rapatrier le plus possible de clandestins", expliquait en 2005 Mougnol à Mougam, le Premier secrétaire à l’ambassade du Cameroun à Rabat au Maroc [6].

Sans papiers mais pas sans droits

Le père est là et entreprend tout de suite des démarches pour la reconnaissance de sa paternité et se fait connaître des différents intervenants. Celui-ci craint que "Houria" soit adoptée.

Il demande l’assistance de son ambassade qui ne lui est d’abord pas accordée. L’ambassade n’en a-t-il pas les moyens ? La volonté politique ?

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Quelques références de conventions internationales

Le père passe en audience devant le Juge des tutelles marocain… la paternité ne lui est pas contestée. L’audience s’est déroulée en arabe. Le Juge lui accorde une autorisation temporaire de visite mais l’assistance de l’ambassade, sous réserve de certaines démarches et de papiers à fournir, est nécessaire ! Les liens se tendent entre le père et l’ambassade.

L’enfant a maintenant 2 ans et demi. Le père est toujours là et poursuit ses démarches pour récupérer son enfant. Mais le père n’a toujours pas de papiers et ne peut plus lui rendre visite...

Saisi par une association humanitaire intervenant notamment auprès de la population subsaharienne, le GADEM tente d’effectuer une médiation auprès de l’ambassade … 5 mois de médiation pour permettre l’accès à la protection de SON ambassade … l’ambassade s’implique et après différentes démarches reconnait la paternité.

Le GADEM sera dorénavant présent pour l’essentiel des démarches... un accompagnement dépassant largement ses prérogatives. Cet accompagnement a permis néanmoins d’atténuer les réticences de certains interlocuteurs, de combler l’absence d’interprète, de crédibiliser un "obscure sans-papiers" et de réaliser un véritable travail de décryptage de la situation et du droit applicable, de lobbying pour que la procédure soit suivie et de soutien à la résolution d’une situation considérée à la base par certains comme impossible.

Un mois et de nombreuses audiences plus tard, le Juge marocain reconnait la paternité et ordonne que l’enfant soit remis à son père par l’orphelinat.

Le père a revu sa fille et on lui annonce qu’il devrait ne pas tarder à la récupérer... il ne devrait pas tarder à la récupérer !

Les démarches qui suivront resteront longues et lourdes, soumettant la remise de l’enfant à différentes signatures, à différents interlocuteurs, de pouvoirs différents et parfois non identifiés... renvoyant à chaque fois à l’irrégularité du séjour, et ce malgré l’ordre donné par le juge de rendre l’enfant à son père. L’irrégularité du séjour impliquerait-elle l’interdiction d’avoir un enfant et d’en être responsable ?

A cela s’ajoute, l’obligation pour le père étranger de se débrouiller pour que la procédure suive son chemin [7]... les missions étant : mettre la main sur les différents signataires, réunir différents interlocuteurs eparpillés au même moment, etc., la fille dans les bras, des interlocuteurs peu disponibles, des heures d’attente, une communication entravée par la non-maîtrise de la langue arabe... des allés-retours incessants à l’orphelinat pour une séparation quotidienne qui marque la précarité de leurs retrouvailles.

Aujourd’hui, le père et sa fille se redécouvrent enfin !

La justice a indéniablement respecté le droit (notamment international) et fait son travail même si au travers de cette situation il est indéniable que de nombreux disfonctionnement apparaissent. L’ambiguïté de l’identité (formelle ? informelle ?) de "Houria" interroge, voire préoccupe !

Le jugement n’a pas été executé d’office et différentes autres entraves sont apparues.

L’ambassade s’est finalement impliqué : mais sous quelle pression ? avec quel investissement ? Comment sans une intervention et un investissement par le GADEM, aurait il assisté ses deux ressortissants (le père et la mineure) ?

La résolution de cette situation pose des problèmes qui risquent de mettre du temps à trouver des réponses... dans des configuration bien plus simples, la plupart des subsahariens irréguliers n’ont pas accès à leurs droits.

[1] arrivés ensemble au Maroc, ayant un autre enfant ensemble enregistré au nom des deux parents, etc.

[2] qui signifie "liberté" en arabe. "c’est joli comme prénom", nous renvoit-on

[3] qui représente à la fois le Gouvernement et chacun des Ministres.

[4] http://appablog.wordpress.com/2007/11/06/maroc-%E2%80%93-le-retour-et-la-reintegration-des-migrants-bloques/

[5] A la suite des événements de Ceuta et Melilla de 2005 et des refoulements dans le désert

[6] Stéphane TCHAKAM ,"129 Camerounais rapatriés du Maroc", 18 octobre 2005, Cameroon Tribune, sur http://www.cameroon-info.net/cmi_show_news.php ?id=16924

[7] Bien que cette "responsabilisation" soit probablement aussi imposée au marocain, par manque de moyens, d’organisation, etc., des tribunaux. L’étranger est peut être néanmoins moins familié au fonctionnement national, cumulant ainsi certains handicaps

Gestion pacifique des conflits ?
2 février 2009 par Clémence

« Ils ne nous laissent pas regarder la télévision, ils regardent tout le temps leur chaîne en arabe et ils ne veulent pas que l’on change le canal. Si on essaie de changer le canal, ils se battent tout le temps. Ils disent qu’ils ont ramené la télévision du Soudan avec eux. Qu’est ce que tu veux qu’on fasse avec des gens comme ça ?  » m’explique G., d’origine congolaise. G est réfugié, il est aussi mineur non accompagné. Il a moins de 18 ans et s’est retrouvé tout seul en Turquie pour demander asile. Le gouvernement turc place les mineurs non accompagnés sous sa protection le temps de leur procédure d’asile, ou du moins jusqu’à ce qu’ils aient 18 ans. A Istanbul, ils sont placés dans des centres pour mineurs, il y en a trois. Jusqu’à il y a quelque mois, ils étaient placés dans ces centres de façon confondue avec les mineurs turcs n’ayant pas de famille ou de tuteur. Quand j’ai commencé à rendre visite à G. assez régulièrement l’an dernier, ils n’étaient que 4 mineurs non accompagnés réfugiés dans le centre de Kadıköy. Puis vers le mois de mai-juin, les garçons soudanais ont commencé à arriver. Cela s’est passé assez vite en fait. D’un seul coup, ils se sont retrouvé à 25 soudanais. D’autre africains francophones sont aussi arrivés, puis d’autres Afghans. Les autorités, pour des questions de gestions ont alors décidé de déplacer les garçons turcs dans un autre centre. Les mineurs de Kadıköy sont désormais 45 à ce jour.

En 6 mois le nombre a donc connu une considérable augmentation. Pourquoi ? Peut être parce qu’ils essaient moins de passer en Grèce. Peut être parce que le passage est devenu beaucoup plus difficile voire impossible. Peut être parce que les autorités turques prennent plus au sérieux leur rôle et leur devoir de protection des mineurs non accompagnés. Quoi qu’il en soit, ils sont désormais là, et vont y rester jusqu’à leur majorité. Et ils sont de plus en plus nombreux à arriver, en majorité en provenance du Soudan ou de l’Afghanistan. Au centre bien sur, ils se regroupent par nationalité, parce qu’ils parlent la même langue. Cela pose alors des sérieux problèmes de cohabitation. Ils arrivent tous avec un passé constitué de traumatismes, perte des proches, ont été témoins et victimes de massacres, d’exploitation, vivent désormais dans un pays dont ils ne comprennent pas au début la langue et le système. Malgré les efforts du personnel du centre de Kadıköy pour leur faire faire des activités (cours de turcs, musique, sport...), ils ne sont pas scolarisés et s’ennuient pour ainsi dire toute la journée. Et ce jusqu’à leur 18 ans.

Alors les conflits éclatent assez facilement. Le dernier en date : la télévision. Il semblerait que la télévision ait été squattée par la « mafia » soudanaise du centre. Les garçons francophones se plaignent du manque de savoir vivre des soudanais. Les soudanais font comme si ils ne savaient rien. Les afghans ont saisi l’occasion pour réclamer leur propre télévision. Et les francophones aussi. Du coup les anglophones s’y sont mis. J’ai donc participé à une réunion d’urgence avec le personnel du centre et les garçon pour essayer de résoudre ce problème diplomatique. Il est clair que le poids du nombre ne joue pas en faveur des francophones (ils ne sont que 5), ni des anglophones (ils ne sont eux que deux). Les somaliens qui d’habitude font alliance avec les soudanais se sont aussi dits qu’ils devraient avoir la leur. Pas crédible les garçons, vous n’êtes que deux et la votre serait aussi en arabe... Les Afghans sont à peu près à égalité avec les soudanais, mais moins prompte à se battre. Les 25 darfouriens qui ont échappés aux attaques des Jenjawids ne semble pas non plus prêt à coopérer de façon pacifique, il semblerait que cette télévision soit un enjeu majeur au centre ces derniers jours. « Ils n’ont qu’à se battre si ils veulent la télévision ». J’essaie d’expliquer que la télévision n’est pas un enjeu majeur aujourd’hui, comme l’eau ou le pétrole, et que l’accès aux canaux francophones ou anglophones ne sont pas sensés nécessiter un conflit de cette ampleur, mais apparemment je fais un bide.

Alors quelle solution ? C’est le groupe le plus fort qui remporte la télécommande ? On joue ça aux cartes ? On détermine des créneau horaires par nationalité ? Non, ils ne sont pas d’accord. Personne n’en démord, il faut qu’on achète une télévision par nationalité ou la guerre va éclater et pour de bon cette fois. Ils commencent à me fatiguer. Et si demain 60 mineurs de Birmanie débarquent, qu’est ce que vous allez faire tous ? On achètera aussi une télé pour eux ?

Bref, il est grand temps de mettre en place quelques ateliers sur le « vivre ensemble en collectivité » et le « dépasser les différences culturelles » avant que les conflits qui ravagent l’Afrique soient importés dans le paisible centre pour mineurs de Kadıköy.... Le personnel du centre est un peu dépassé. Je prévois moi même une descente avec un ami soudanais qui était avant instituteur au Darfour afin de remettre les pendules à l’heure dans sa communauté de mineurs...

Enfin leur dernier coup d’éclat me redonne le sourire : depuis pas mal de temps, les garçon se plaignaient du chef cuistot du centre dont la façon de distribuer la nourriture dénotait un penchant relativement raciste, ou politiquement incorrect en tout cas. La semaine dernière, la révolte a éclaté. Les garçons nous appellent dans la soirée : «  On a décidé de ne plus manger jusqu’à ce que le cuisinier s’en aille. On a fait une réunion tous ensemble et on a décidé de faire une grève de la faim jusqu’à ce que nos revendications soient acceptées. On ne mangera plus tant qu’il est là.  » Ils sont vraiment énervés, j’imagine très bien l’ambiance au centre qui doit être survoltée. Je raccroche le téléphone. Allah Allah, pour une histoire de télévision vous êtes donc prêts à déclarer la guerre des gangs mais vous arrivez à faire une réunion à 45 entre vous, en 4 langues différentes et à déclarer une grève de la faim de manière solidaire ? Ils ont gagné, le cuisinier est parti. Aucun d’entre eux n’a brisé la grève (qui n’a duré que 24 heures, mais quand même...). Les conflits peuvent donc s’oublier ou être mis de côté au profit de l’action collective. Bravo les garçon, je suis vraiment admirative. Mais s’il vous plait, que chaque nationalité ne se mette pas maintenant en grève de la fin pour avoir sa propre télévision...

En Espagne, la société civile se mobilise contre les centres de rétention
26 janvier 2009

L’Espagne compte actuellement neuf Centres d’Internement pour Etrangers [1] et deux Centres de Séjour Temporaire qui sont destinés à retenir les étrangers en situation administrative irrégulière en attente d’expulsion. La capacité totale de l’ensemble de ces centres est proche de 4 000 places, mais ce chiffre ne reflète que partiellement la réalité, car il existe également plusieurs centres informels dont on ne connaît ni la localisation exacte, ni la capacité.

Il faut souligner que les conditions d’enfermement dans ces lieux sont particulièrement déplorables. Un Arrêté ministériel définit quelques normes de fonctionnement mais la réglementation reste largement insuffisante : les ONG espagnoles dénoncent un manque de personnel et d’infrastructures, ainsi que des mauvais traitements de la part des fonctionnaires de police.

Ajoutons que les ONG se voient presque systématiquement refuser l’accès aux centres, en dépit du fait que ce droit est reconnu par l’Arrêté ministériel précité. Le manque total de contrôle exercé par des autorités indépendantes de l’administration espagnole favorise l’exercice de toute sorte d’abus de la part du personnel et de nombreuses violations des droits des personnes retenues.

Face à cet état des lieux, la société civile ne baisse pas les bras. De nombreuses manifestations ont eu lieu au cours de ces dernières années, des plaintes ont été déposées auprès du « Défenseur du peuple » et diverses ONG ont publié des rapports, comme l’ Association Pro-Derechos Humanos de Andalucia.

Les organisations membres de Migreurop en Espagne [2] ont quant à elles décidé de s’impliquer dans la campagne « pour un droit de regard dans les lieux d’enfermement des étrangers ». Elles demandent aux autorités espagnoles de garantir légalement et sans restriction l’accès des ONG dans ces lieux pour assister les personnes retenues et jouer un rôle d’alerte. Elles manifestent leur radicale opposition à l’allongement de la durée maximale de rétention de 40 à 60 jours, telle que le prévoit le projet de réforme de la loi sur l’immigration qui sera débattu prochainement au Parlement. Enfin, elles soulignent que ces revendications doivent être comprises comme une étape en vue de la suppression des centres de rétention, car une simple irrégularité administrative ne saurait justifier d’aucune façon la privation de liberté.

Un manifeste regroupant ces revendications a été présenté publiquement lors d’une conférence de presse à Madrid le 13 janvier. Le 30 janvier, les associations espagnoles participeront à la journée de mobilisation internationale convoquée par Migreurop, en visitant le centre de rétention de Madrid, en compagnie d’un député européen. Elles comptent ensuite poursuivre le travail de plaidoyer commun en demandant à être reçu par le Ministre de l’Intérieur pour présenter des amendements au projet de réforme de la loi sur l’immigration.

Pour plus de renseignements sur la campagne "pour un droit de regard dans les lieux d’enfermement des étrangers", consultez :http://www.migreurop.org/breve129.html

[1] Equivalent des Centres de Rétention Administrative en France.

[2] ACSUR Las Segovias, Andalucia Acoge, la Asociacion Pro-Derechos Humanos de Andalucia, la Commission Espagnole d’Aide aux réfugiés et la Fédération SOS Racismo.

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