Le 2 août 2017, soit même pas une semaine après le discours du roi qui évoquait la « honte » des marocain-e-s et de leurs représentant-e-s face au « bilan et la réalité des réalisations dans certains domaines sociaux », Ghazi Khellada décédait après plus de 90 jours de grève de la faim. Paysan de Ouaouizert, petite bourgade coincée entre Beni Mellal et Marrakech (province d’Azilal), il avait été emprisonné en avril dernier à la prison de Beni Mellal. Il n’a été transféré en service hospitalier que quatre jours avant son décès. Il laisse derrière lui une femme et une fille d’à peine quatre ans.

Depuis, sa famille et ses soutiens réclament justice. Ils et elles ont refusé la dépouille et demandent l’ouverture d’une enquête sur les circonstances de sa mort. En effet, ils et elles accusent l’administration pénitentiaire d’avoir volontairement dissimulé l’état de santé de leur parent pendant sa grève de la faim. L’heure est actuellement à la répression, si l’on en croit les journalistes qui documentent tant bien que mal les conflits sociaux dans le royaume chérifien.

Il faut préciser que l’homme n’était pas un simple détenu. S’il était officiellement accusé d’avoir détruit un pont par les autorités, c’est bien ses actions contre un notable de la région qui dérangeaient. L’homme en question aurait acquis, il y a quelques mois, un terrain à proximité de la terre de Ghazi Khellada. Lors des formalités administratives liées à cette acquisition, il aurait fait ajouter à sa nouvelle propriété une route qui dessert le domicile de Ghazi Khellada et de sa famille. Cette acquisition frauduleuse sur le plan légal a été validée par une visite nocturne des agents de la conservation foncière. Le dossier est donc largement entaché d’éléments non-conformes.

Appuyé par la section locale de l’Association Marocaine des Droits de l’Homme (AMDH), l’homme a donc tenté de porter plainte. Même après des allers-retours incessants, la procédure n’a pas abouti et c’est alors qu’il a décidé de s’installer dans une tente en signe de protestation. Il y est resté pendant six mois, malgré une première arrestation et un premier séjour en prison d’une semaine.

Ce n’est qu’en avril où il a été arrêté de nouveau sur la base d’accusations qu’il conteste (destruction d’un pont avec son frère). Il a entamé une grève de la faim très peu de temps après pour protester contre ces accusations, son emprisonnement et pour réclamer la justice en ce qui concerne son conflit foncier. Son frère, lui, avait finalement été condamné par la justice, il y a environ un mois, à un an de prison. Ce qui n’avait fait que renforcer sa détermination dans son combat. Peu de temps avant de mourir, il aurait déclaré : « Si on ne me rend pas justice, ne m’enterre pas ! ».

Qu’il repose en paix. En attendant, son frère est également en grève de la faim depuis sa condamnation. Espérons que les autorités n’auront pas besoin d’un deuxième mort pour comprendre la détermination de la famille à faire entendre sa version.

 

Sources : Yabiladi et le compte Tweeter d'Omar Radi