Faubourg, mon amour

Coiffeurs afros, bars à bobos, kebabs ou restos chics, la rue du Faubourg-Saint-Denis et ses rues adjacentes dessinent un Paris métissé. Balade dans un faubourg qui ne cesse de se transformer.

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Le virus du quartier

Chapitre 1

« Quand vous avez le virus du quartier, il ne vous quitte plus. Ici, parfois c’est mieux que le ciné ! » Adelia, 56 ans, a attrapé le virus du Faubourg-Saint-Denis depuis 23 ans. Elle n’a pas une ride : « Chez moi, les rides sont à l’intérieur », dit-elle avec un beau sourire. Elle a le regard franc et droit. Elle fume comme un pompier. Adelia est arrivée du Portugal en 1993. Avant Paris, c’était Le Havre : « Je suis arrivée en France par hasard. J’ai rencontré des Auvergnats, puis j’ai eu la gérance du Café Saint-Denis et après ils me l’ont vendu. » Elle possède aussi un petit resto Lisbonne à Paris, au 13 rue de l’Échiquier.

Le Faubourg d’Adelia est multiculturel, populaire et hype, ici on peut être déchu mais pas déçu. Ancienne voie royale, cette rue du 10ème arrondissement parisien est, aujourd’hui, un lieu prisé pour ses bars et ses restos estampillés Le Fooding. Chez Jeannette, au Mauri7 ou au Prado, les bars historiques du quartier, se côtoient les nouvelles générations et les vieux faubouriens qui ne quitteraient ce bout de Paris pour rien au monde.

"Ici des origines vous en avez dans tous les sens, ça ne pose pas de problèmes. Ca reste un quartier populaire, sinon ça serait dommage. Il y a ceux qui sont là depuis longtemps et les nouveaux" raconte Adélia.

Les nouveaux, depuis quelques années, c’est les bobos, les trentenaires arty, ouverts, déconneurs, qui débordent des bars une fois la nuit tombée. Ils sont séduits par l’ambiance détendue et festive, les consommations sont accessibles, « sauf chez les friqués du 52 », glisse François Salman, serveur de 23 ans au Ô P'tit Paris, passage des Petites-Écuries. Le 52 est l’antithèse des troquets de la rue. Le restaurant a été entièrement retapé avec des murs en pierre blanche. Les verres à pied qui trônent sur les tables en bois détonnent avec les verres fêlés du Saint-Denis.

Il y a 20 ans, Djamel, ami d’Adelia était serveur, lui aussi, au Sully. Il se rappelle des habitués de l’époque, de Hareski, qui traînait déjà dans le coin. « Hareski, c’était mon premier client. Pour mon premier jour de travail, j’avais mis une cravate. Il me l’a attrapé et m’a dit : « Enlève ta cravate, ici pas besoin ! ». Personne ne porte de cravate au Sully. Les deux barmans sont joyeux, le chevelu tatoué siffle un shot de temps en temps avec les piliers de bar, le second plaisante avec Hareski.

Hareski a 75 ans, c’est une figure importante du Faubourg. Il est au Saint-Denis le soir avec son demi de blonde, au Sully le matin avec son café Calva lisant Le Parisien. « Je suis arrivé en 1973, jamais je quitterai le quartier. Quand j’ai connu le café j’étais le plus jeune, maintenant je suis le plus vieux », dit-il avec un énorme sourire édenté. Hareski a acheté une chambre de bonne de 10 m2 près du faubourg, du côté de République. Il ne se souvient pas du prix. « C’est pas grand, il y a des cafards mais je suis heureux. » Il n’a jamais travaillé, il dépense sa « petite rente » au Saint-Denis ou au Sully.

Article 1

Doux rêveurs. Le premier est un passionné de nature, le second est un éco-citoyen accompli. Les deux hommes sont des moteurs de l’Agrocité. Yvon et Benoît partagent une vision naturaliste de la vie, l’envie de faire avancer les pratiques écologiques en milieu urbain, et la certitude que si chacun fait sa part, on peut avancer collectivement.

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« Avant, c’était sale, il y avait beaucoup de bagarres. Maintenant, c’est beaucoup mieux »

Un peu plus loin dans le bar, Ahui plaisante avec Ly Wei et Michel en épluchant des clémentines. Elle a 53 ans, elle est arrivée en France il y a 18 ans, elle est veuve depuis trois ans. Elle fait des ménages, des gardes d’enfants, de la couture. Son amie, Ly Wei, est arrivée il y a 11 ans, elle s’est mariée à un Français. Elle cherche du travail et des cours de français pour sa fille de 21 ans qui vient d’arriver de Chine. Elles boivent un café noisette avec Michel, petit homme de soixante ans. Tous les trois se sont rencontrés ici, au café. Michel leur montre des photos de son dernier marathon. Il habite dans le Faubourg depuis 40 ans. Il aime son quartier : « Avant, c’était sale, il y avait beaucoup de bagarres. Maintenant, c’est beaucoup mieux. Il y avait plein de drogue à l’époque, le crack dans le métro, pour moi le quartier s’embellit. »

Malgré les fermetures administratives imposées au Saint-Denis et aux autres bars de la rue, pour cause de tapage nocturne, Adelia ne se plaint pas non plus, du nouveau visage du Faubourg : « Il y a toujours les habitués, mais ils vieillissent, ils bougent, rentrent au pays. Le soir ça change, avec l’arrivée des jeunes. » Elle se rappelle : « Avant on avait pas besoin de sortir du Faubourg pour acheter tout ce qu’on voulait, il y avait plein de commerces. Après, il y a eu les kebabs, plein de kebabs collés les uns aux autres. Maintenant, c’est les restos. » - « C’est pas des restos c’est des burgers ! », rectifie Djamel. Hareski complète en plaisantant : « Ça reste cosmopolite, il y a des Noirs, des Arabes, des Roms, des dealers, des voleurs. »

Shafiq et Bachir, font partie des meubles du Saint-Denis. Dès le matin, au rouge et au comptoir. Shafiq, bonnet noir mal ajusté, moustaches grisonnantes, est venu du Pakistan en 1982. En France, il a été marin, gérant d’un atelier de confection puis poissonnier dans le Faubourg. « Plusieurs fois je suis parti d’ici, j’arrive pas à rester à l’extérieur. » Bachir, son ami de 25 ans acquiesce. Il est venu d’Algérie en 1975, puis ce fameux virus du Faubourg l’a empêché de bouger. Il connaît l’histoire du Faubourg comme personne : « À l’époque, tout tournait autour du Parisien Libéré, rue d’Enghien. Il y avait des imprimeries et les journalistes laissaient des journaux aux ouvriers Chez Jeannette. Puis il y a eu des Yougoslaves et des Grecs. C’était le textile. Les Turcs et les Kurdes sont venus après, puis les Chinois. »

Les parents de François Salman, le jeune barman, Kurdes communistes ont travaillé longtemps dans les ateliers de confection de la rue, à deux pas du Sentier, le centre névralgique du textile parisien. Pour l’enfant du quartier : « L’âge d’or du Faubourg, c’était il y a 10 ans. Mes parents sont partis avec la crise du Sentier en 2001. »

Article 1

Doux rêveurs. Le premier est un passionné de nature, le second est un éco-citoyen accompli. Les deux hommes sont des moteurs de l’Agrocité. Yvon et Benoît partagent une vision naturaliste de la vie, l’envie de faire avancer les pratiques écologiques en milieu urbain, et la certitude que si chacun fait sa part, on peut avancer collectivement.

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Doux rêveurs. Le premier est un passionné de nature, le second est un éco-citoyen accompli. Les deux hommes sont des moteurs de l’Agrocité. Yvon et Benoît partagent une vision naturaliste de la vie, l’envie de faire avancer les pratiques écologiques en milieu urbain, et la certitude que si chacun fait sa part, on peut avancer collectivement.

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Doux rêveurs. Le premier est un passionné de nature, le second est un éco-citoyen accompli. Les deux hommes sont des moteurs de l’Agrocité. Yvon et Benoît partagent une vision naturaliste de la vie, l’envie de faire avancer les pratiques écologiques en milieu urbain, et la certitude que si chacun fait sa part, on peut avancer collectivement.

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Michel Le premier est un passionné de nature, le second est un éco-citoyen accompli. Les deux hommes sont des moteurs de l’Agrocité. Yvon et Benoît partagent une vision naturaliste de la vie, l’envie de faire avancer les pratiques écologiques en milieu urbain, et la certitude que si chacun fait sa part, on peut avancer collectivement.

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Chapitre 2

La petite Istanbul

L’histoire du Faubourg-Saint-Denis est celle du Sentier et de l’immigration turque à Paris. Les Turcs et Kurdes, sans-papiers pour la plupart, s’installent dans les ateliers du Faubourg, les Pakistanais livrent les tissus, un diable à la main. On appelait l’endroit « la petite Istanbul », « il y avait même une mosquée turque, mais elle a fermé parce que le loyer n’était pas payé », explique Djamel.

La librairie légendaire Ozgul où les intellectuels turcs venaient acheter du Pablo Neruda a elle aussi disparu. Tout comme les nombreuses agences de voyage turques. « Chaque été, mes parents venaient acheter leurs billets pour la Turquie chez Mondial Tourisme, maintenant c’est devenu le café Mondial. Ils ont gardé le nom au moins », se rappelle Gamze Kurt médiatrice à l’ACORT, l’Assemblée Citoyenne Originaires de Turquie. Les territoires de la petite Istanbul se sont réduits au fur et à mesure que les ateliers de confection se vidés. « Le départ des Turcs coïncide avec la fin des ateliers de confection, maintenant c’est l’importation. Tout le monde se débrouille autrement », raconte Gamze Kurt.

Les ateliers sont maintenant tous confinés au 14, à l’entrée du Faubourg. La cour est vide, les fenêtres recouvertes de papiers blancs ou de morceaux de tissus pour éloigner les yeux curieux. Mustafa, jeune kurde de 27 ans y tient un atelier de confection depuis un an et demi. Ses cinq salariés, trois Chinoises et deux Turcs, penchés sur leur machine à couture, assemblent des tissus fins aux motifs léopards.

Les vêtements seront ensuite livrés aux magasins du Sentier ou de la rue Saint-Denis. Dans l’atelier, la lumière blafarde tremble, fait mal aux yeux. « Après quelques jours on s’y habitue », dit Mustafa. « C’est difficile la confection mais c’est ce que j’aime. Depuis les attentats, les Juifs (les travailleurs du Sentier) ont annulé plein de commandes. S’il y a d’autres attentats, ils vont partir ou il faudra changer de métier ». En attendant, la vie continue, la pièce assemblée vaut 2 euros et les employés travaillent de 7h30 à 18h.

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Chez Univers Machines, au 62 de la rue du Faubourg, on a déjà vu Moustafa passer. Un couple d’origine cambodgienne tient ce magasin de vente de machines et fil à coudre depuis plus de 20 ans. Leur Faubourg est celui de la crise. Des journées à attendre les rares clients, avec l’espoir de vendre les centaines de rouleaux de fil de toutes les couleurs, un stock que le couple n’arrive pas à écouler. Ils n’ont pas tissé beaucoup de lien avec les habitants du quartier : « Quand on est dans la boutique, on parle avec les gens qui entrent, mais quand il sort de la boutique, ça reste juste un client », explique la femme qui ne souhaite pas donner son prénom.

C’est la conception de Margaux : la nature comme vecteur de lien social. Spectatrice discrète, elle observe les jardiniers de l’Agrocité discuter de leurs pratiques, s’échanger graines, fruits, légumes, fleurs et recettes de cuisine.

Un prétexte pour échanger. « Univers Machines ? J’y vais parfois, mais les fils sont plus chers chez lui, moi je vais à Châtelet. C’est 20 centimes de moins la bobine », explique Mustafa.

Un peu plus loin dans la rue, Chez Urfa Dürüm, les brochettes fument, les commandes s’enchaînent. La crise n’est pas passée par là. Ce restaurant vend des sandwichs kurdes depuis 1997. Dans la salle exiguë du fast-food, une jeune pakistanaise travaille la pâte à la main, son collègue s’occupe du gril avec un sèche cheveux à la main. Oguz Pierre, Kurde naturalisé français, n’aime pas beaucoup parler d’affaires. « C’est notre secret ». Pour lui, le quartier n’est pas du tout la Petite Turquie, « c’est de la propagande de Turc et de Kurde ça, c’est n’importe quoi, il n’y a pas un seul habitant turc. » La faute aux loyers trop chers, mais une garantie de réussite pour des restaurateurs comme lui. « J’ai toujours travaillé avec les bureaux, les Turcs ou Kurdes trouvent que je suis cher. » À 7 euros le sandwich sans frites, ils préfèrent aller manger un kebab à 5 euros.

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Vidéo

Cher, le Faubourg. À 8 000 euros le m2 et 15 euros le hamburger, la rue attire une population de plus en plus aisée. Certains crient à la gentrification, quand d’autres se réjouissent de ce nouveau mélange. Un groupe Facebook « Le Faubourg, quel quartier pour demain ? » veut, quant à lui, « lutter contre l’oberkampfisation du quartier ». Le Faubourg n’en est pas à son premier changement, conservera-t-il son âme ?

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Rédactrices : Sévin Sahin, Lola Favard-Petkoff ; Secrétaire de rédaction : Sophie Mirande

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