Fortaleza, sous la gestion de la maire Luizianne Lins ( qui remet son mandat en jeu dans peu temps, la campagne commence dans un mois), a mise en place depuis 2005 le budget participatif, présenté comme un des instruments de concertation avec les habitants devant permettre la participation de tous à l’élaboration des projets de la ville.

Le Budget Participatif

Le budget participatif BP (Orçamento participativo en Portugais) se définit comme un mécanisme de gouvernance de démocratie participative permettant aux citoyens d’influencer ou de décider une partie des budgets publiques, le plus souvent ceux des investissements municipaux. Le but premier du BP de Fortaleza est d’améliorer la gestion de la cité en permettant aux habitants de faire des propositions de services et de travaux qui seront exécutés en priorité para la municipalité. Ces propositions sont discutés et décidés par les habitants. L’idée la plus importante est de partager le pouvoir de décision avec la population. Le résultat des concertations et des débats aboutit par la réalisation d’un Plan des Travaux et Services (Plano de Obras e Serviços – POS, en portugais), réalisé par le Conseil du BP, consacrant les demandes approuvées. Ce POS permet aussi l’accompagnement et le contrôle par la population de la réalisation des travaux, et ainsi offrir une transparence plus grande dans la gestion municipale.

Avant de rentrer dans les détails de l’organisation du BP, il convient de mentionner l’instrument de base du développement urbain, le Plan Directeur Participatif - PDP, élaboré aussi à partir d’un processus participatif. Ce plan est considéré comme un pacte territorial combinant les normes politiques et développement urbain. Il définit l’occupation des sol, l’implantation des équipements publics, les zones d’habitat populaire, de protection environnementale et les zones à valeur historique, pour réaliser l’organisation de l’espace urbain. Le développement de la ville devant toujours assurée sa fonction sociale (ce qui fut peu le cas jusqu’à présent, le cas des favelas en est l’exemple le plus flagrant, mais pas l’unique).

Le fonctionnement du Budget Participatif

Parmi les institutions, le Secrétariat de la Planification et du Budget (SEPLA) est au coeur de du PDP et BP. Le BP est organisé sur un cycle de deux ans, la première année va ser servir définit le POS qui sera réalisé l’année suivante.

 Le cycle du BP participatif est jalonné de réunions communautaires, organisées par l’équipe du BP sur sollicitations. Ces réunions sont là pour divulguer de manière la plus large possible l’esprit du BP et appeler à la participation.

 Les Activités Préparatoires sont les premiers pas de l’élaboration du BP. Organisées en Assemblées Préparatoires, on y expose les possibilités et les limites du budget municipal, avec la participation du Secrétariat des Finances et on y préparent les Assemblées délibératives. Dans ces assemblées préparatoires, les habitants (à partir de 16 ans) discutent des réalités de chaque zone de la ville ou bien de son segment social. Ce réunions permettent aussi de diffuser l’agenda du BP.

 Après cette première phase, vient la période des Assemblées Délibératives pour délibérer et décider. Chaque communauté, chaque quartier va proposer des demandes de travaux et de services, dans le cadre des axes du BP du Plan Pluriannuel Participatif. Chaque participant vote, parmi les différentes propositions, pour trois d’entre elles (qui doivent appartenir à des axes différents). Il y a un lien numérique entre de le nombre de participants à l’assemblée et le nombre de propositions que l’assemblée va pouvoir formuler pour le POS. Les axes thématiques sont aussi là pour faciliter la compréhension et répartir les ressources disponibles en équilibrant les demandes.

 On procède aussi au vote des représentants des assemblées, les délégués du BP. Ils vont accompagner le processus tout au long de sa mise en place, contrôler son application, tout en tenant les communautés des évolutions. Ils participent aussi aux forums régionaux de la ville (Fortaleza est découpée administrativement en 6 SER – Service Régionaux, regroupant chacun plusieurs quartiers), ils se forment au fonctionnement municipal et aident à mobiliser pour les activités du BP. Ils élisent par ailleurs les Conseillers Régionaux représentant la ville dans le Conseil du BP.

 em plus des assemblées de habitants, on organise les Les assemblées des segments sociaux (femmes, personnes âgées, population noire, gays-lesbiennes-transsexuels-travestis, personnes avec un handicap et jeunesse). Ils disposent aussi d’un forum et de représentants pour le Conseil du BP, ainsi que le forum des enfants et adolescents (de 6 à 17 ans). Dans ces assemblées sont exposées des problématiques propres aux différents segments. Les segments sociaux sont là pour mettre en avant le concept de différences égales et essayer de rompre avec le système de domination sociale existant, lutter contre les discriminations et les exclusions, contre la ségrégation spatiale, contre les abus dans le travail, etc.

 Le Conseil du Budget Participatif est le dernier niveau du BP. Il réunit les conseillers élus lors des forums régionaux et lors de la plénière des segments sociaux. Ils participent aux négociations directes avec la municipalité et définissent le Plan des Travaux et Services et ses actions prioritaires. Le Conseil contrôle aussi le fonctionnement du BP et adapte le règlement chaque année. En chiffre cela donne près de 25 000 citoyens participants en 2007 et 153 assemblées.

Les principes

Fortaleza a repris plusieurs principes qui entourent le BP et qui sont liés à la gestion participative de la ville :
 La délibération populaire qui dépasse le cadre de la consultation, dans un compromis avec la municipalité délimitant l’intervention des citoyens.
 L’auto-réglementation, pour permettre de faire évoluer la structure et de l’adapter aux demandes et aux limites rencontrées.
 La formation citoyenne, pour plus de transparence, d’efficacité. L’apprentissage collectif sur les problèmes liées à la ville, à la structure publique.
 L’universalité autonome et volontaire de la participation et le droit à la participation
 La co-gestion des politiques publiques combinant la démocratie représentative et directe. Ce processus facilite ainsi le dialogue et la collaboration améliorant la gestion publique.
 Le contrôle social de l’action du gouvernement municipal, des dépenses publiques et l’accès à l’information.
 L’inclusion sociale des segments sociaux vulnérables et leur meilleure représentativité dans la société.
 La citoyenneté active de plein droit et sa pleine autonomie dans les choix et la possibilité de le faire.
 Les assemblées territoriales et les réunions régionales dans les quartiers contribuent à créer du lien social et à affirmer la démocratie.

Le plan directeur, le BP , le plan pluriannuel du BP, les agendas 21 sont autant outils pour changer la culture politique et développer celle de la participation démocratique et de son apprentissage. Il y a bien évidemment des limites dans son application comme le fait qu’une minorité de la population participe, en partie celle de la société civile. Mais la démocratie participative est aussi un moyen d’imposer la démocratie en soi (qui est encore jeune, puisqu’elle démarre en 1985) avec une mode de fonctionnement différent de l’Europe, qui s’adapte à l’importance des communautés. Le travail autour du segment enfant et adolescent et du segment jeune montre la volonté d’éduquer à la démocratie, de la diffuser. C’est aussi un des fers de lance de la politique du gouvernement brésilien, et des municipalités PT, pour permettre de rompre avec un système politique clientèliste et qui offre la part belle à une minorité. Il vise donc a donc une remise en cause de la dépolitisation du système néolibéral par la participation du citoyen et de la communauté aux affaires de la cité.