La ministre de l’écologie du Brésil démissionne La ministre de l’écologie du Brésil, Marina Silva, a démissionné de ses fonctions le 13 mai dernier. Retour sur une figure forte de l’écologie brésilienne. Marina Silva est née près de Rio Branco en 1958, dans une famille de récoltant de gomme (seringueiras). Malgré l’absence d’école, elle arrive à intégrer l’université Fédéral de l’Acre et se forme en histoire. Elle découvre là le marxisme et incorpore le Parti Révolutionnaire Communiste (PRC), qui rejoindra plus tard le Parti des Travailleurs (PT). Devenue professeur, elle s’engage dans le syndicalisme et fonde avec Chico Mendes, assassiné pour son combat pour la préservation de l’Amazonie, la Centrale Unique des Travailleurs (CUT) en 1985. La même année, elle entre au PT et est élue conseiller muncipal dans le Município de Rio Branco (division administrative proche de la municipalité), où elle s’attaque aux privilèges des conseillers municipaux, s’attirant la sympathie populaire. Elle est élue députée de son État en 1990 mais découvre qu’elle est, depuis sa période dans le seringal, contaminée aux métaux lourds. En 1994, elle est élue sénateur de la république pour le gouvernement d’Acre, qui est de tradition politique de grands propriétaires et entrepreneurs. Son engagement pour la protection de l’environnement l’amène à devenir Secrétaire Nationale de l’Environnement du PT. Elle devient l’un des portes voix internationales de la défense de l’Amazonie Après la victoire de Lula en 2003, elle entre au gouvernement comme ministre de l’environnement, marquant l’arrivée de l’aile "environnementaliste" face à la tendance majoritaire et historique "développementaliste" qui se préoccupe moins de l’environnement et cherche avant tout la croissance et la mise en valeur des richesses du pays (et que l’on retrouve dans de nombreux ministères comme celui de l’agriculture). La ministre peut cependant mettre en avant de nombreuses actions lancées pour la défense de l’environnement et dans la mise en place de priorités : comme la conservation de la biodiversité, un plan sur les ressources hydroélectriques, un plan national de gestion des forêts, un plan sur la désertification ou un autre sur le changement climatique. Tout en articulant et en réorganisant le ministère de l’environnement pour le rendre plus réactif et efficace. C’est avec les promoteurs d’une politique de développement du Brésil, qu’ils soient du PT ou de l’opposition que les points de divergences ont été les plus nombreux. Notamment dès 2003 au sujet des OGM, où elle se heurte au ministre de l’agriculture Roberto Rodrigues ou encore en 2005 face à Zeca du PT qui lance un projet de loi sur l’implantation d’usine d’alcool de canne sur le Pantanal. Voir les différentes polémiques. En 2005, elle lance une plan de gestion des Forêts publiques avec des permis d’exploiter devant permettre de limiter la déforestation en la contrôlant. Cependant elle critique le manque de moyen octroyé pour mettre en application les contrôles. Fin novembre 2007, les chiffres de déboisement de la forêt sont si mauvais, qu’elle décide de les rendre publics, créant alors une crise gouvernementale où sa démission fut déjà proche. En 2008, elle lance le ’"Plan Amazonie Durable" dont Lula considère qu’elle est la "mère" et qui doit permettre le contrôle des activités illégales en Amazonie et la mise en place de projets de développement durable pour la population locale. Mais la mise en oeuvre du plan est confiée au Ministre extraordinaire des Sujets Stratégiques, Mangabeira Unger, un des tenants de la politique "développementiste" et qui estime donc le potentiel de l’Amazonie comme un vecteur de croissance. Revers de trop pour la ministre qui démissionne le 13 mai 2008. la ministre présente sa démission comme un moyen de renouveler la dynamique environnementale et pourrait, à l’inverse d’être d’un échec, être une réussite si sa démission débloque des situations et permet une prise de conscience générale. Les différentes polémiques et luttes notamment au sein du gouvernement et y compris avec Lula irrité par la sortie médiatique de sa ministre, rendait la tâche compliquée . Parmi les critiques entendues, certains mettent en exergue son manque de recherche du compromis, d’autres mettent en avant un comportement trop "militant" et pas assez politique, ou bien encore, ses positions trop radicales sur la défense de l’environnement. Au-delà de la simple démission, cette difficulté d’intervention de la ministre montre à quelle point il est difficile d’empiéter sur la conception du miracle économique et de la croissance comme moyen de développement ou du front amazonien à explorer, rhétoriques ancrées dans l’histoire même du Brésil. Son successeur, Carlos Minc, est lui aussi un écologiste fondateur du Parti Vert et connu pour être médiatique. Il a annoncé qu’il ne voulait pas diriger un ministère faible et qu’il souhaite avoir les moyens de poursuivre les politiques menées par Marina Silva. Il a même demandé l’envoi de l’armée em Amazonie, avant de se raviser pour la rallier la proposition de Marina Silva et de considérer la création d’une Garde Nationale de l’environnement comme nécessaire. La démission de Marina Silva va donc être le révélateur de la véritable volonté du gouvernement de Lula de poursuivre la difficile voie écologiste ouverte par Marina, ce que semble vouloir continuer Carlos Minc. Elle va surtout permettre de voir si à moyen terme, la question de l’environnement au Brésil à réellement avancée (l’Amazonie en étant le symbole), où si le développement du pays relègue la question au second plan. |
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