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Haïti / Exclusion urbaine /

L’impossible équation du logement en Haïti
6 octobre 2008 par Lucie Couet

La ville haïtienne est dense, très dense. Aussi dense que le centre de Paris, l’une des capitales les plus denses du monde. Et pourtant les logements sont minuscules, en particulier dans les quartiers précaires : une ou deux pièces par famille de cinq à six personnes. Ces logements sont insalubres et souvent mal ou pas reliés aux réseaux d’eau et d’électricité. Les migrations des ruraux ont restreint le nombre des terrains constructibles disponibles et ont fait grimper leurs prix. Les logements en location sont très chers. Comment un ménage de classe moyenne peut-il accéder à un logement décent en ville ?

Le premier réflexe est de s’interroger sur les capacités de prêt dans les banques. Un réflexe qui coûte cher. Les taux sont proches de l’usure. Si le ménage emprunte en gourdes, la monnaie nationale, le taux se situe entre 20 et 28%. Pour que l’argent coûte moins cher, il faut donc emprunter en dollars américains, et les taux restent démesurés : entre 12 et 18%. Ces taux sont variables au-delà d’un an. De plus, pour emprunter, il faut apporter des garanties suffisantes aux banques : garant dans la famille, nom connu, travail bien rémunéré, mariage… Autant de critères aux fondements douteux. Malgré tout, les emprunteurs sont nombreux. Il est difficile de se procurer de l’argent en Haïti. Les ménages sont souvent prêts à payer cher le prix de leur projet d’installation car les logements décents à des prix raisonnables sont rares.

Pour l’acquisition d’un terrain, les taux sont les mêmes. Bien souvent, c’est la solidarité familiale ou l’héritage – anticipé ou non – qui subventionne donc la construction. Sans apport personnel, au minimum sous la forme d’un terrain, l’endettement n’est pas tenable. Il faut donc que les familles lèguent ou donnent un terrain. Ainsi on retrouve en milieu urbain le système du « lakou » rural : plusieurs maisons des membres d’une même famille distribuées autour d’une grande cour. Mais toutes les familles ne sont pas des propriétaires fonciers.

L’Etat n’est pas compétent en matière de logement, qu’il soit social ou privé. Les rares ensembles de logements sociaux ont le plus souvent été des opérations expérimentales ou des « vitrines » pour les politiques nouvellement élus. En l’absence de gestion, pour des raisons que j’ignore, ces logements publics ont été sous-loués, voire revendus, étendus ou détournés de leur fonction. Aujourd’hui l’Etat n’intervient plus, autant que je sache, dans la construction, la gestion ou le financement de l’habitat. Seules quelques ONG, comme Habitat pour l’humanité, construisent des maisons pour les ménages. Petits projets et grands besoins. Néanmoins ces projets se réalisent souvent en dehors de tout souci urbanistique, sur des terrains non viabilisés, et leur durabilité n’en est que plus menacée.



Pour conclure cette rapide analyse, on peut dire qu’il n’existe donc pas de solution à ce jour et que la crise ne peut qu’empirer. Même si on gagne bien sa vie, accéder à la propriété ou louer un logement est difficile. Surtout si on ajoute au coût du loyer – ou du prêt – le montant des déplacements automobiles en augmentation. Les biens familiaux ou les parents qui se portent garants sont l’unique solution. Ce marché ultra-libéral est donc extrêmement sélectif. L’ascension sociale que peuvent représenter l’acquisition d’un logement ou le déménagement dans un nouveau quartier est limitée à une classe déjà au sommet de l’échelle. Ou comment l’absence d’un système mieux régulé bloque les trajectoires individuelles ascendantes.



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